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Neuchâtel: l'homme met en péril la diversité comportementale des chimpanzés

Les activités humaines mettent en péril la diversité comportementale des chimpanzés. C’est le résultat d’une vaste étude internationale à laquelle a participé l’Université de Neuchâtel.

07 mars 2019, 20:00
L'étude compile un ensemble de 31 comportements de chimpanzés provenant de 144 groupes sociaux ou communautés.

La diversité comportementale des chimpanzés est en péril à cause des activités humaines et de l’impact sur leurs territoires. C’est le constat d’une vaste étude internationale avec participation neuchâteloise, publiée dans la revue Science.

Comparés à d’autres singes, les chimpanzés présentent une large diversité de comportements. La plupart s’apprennent socialement par imitation et sont spécifiques à certains groupes d’individus. «Cela suppose l’existence de différentes cultures parmi les chimpanzés», indique ce jeudi l’Université de Neuchâtel (Unine) dans un communiqué.

Comme d’autres grands singes, ils subissent la pression des activités humaines. Leurs habitats originels, forêts tropicales ou de savane, sont de plus en plus transformés en exploitations agricoles, plantations, voire en zones d’habitation. Sans même parler des dégradations provoquées par l’extraction de ressources naturelles ou le développement d’infrastructures.

Vaste compilation

Une équipe internationale dirigée par le Max Planck Institute for Evolutionary Anthropology et le German Centre for Integrative Biodiversity Research a compilé un ensemble de 31 comportements de chimpanzés provenant de 144 groupes sociaux ou communautés.

En plus de ces informations disponibles dans la littérature scientifique, cette recherche comprend des travaux menés durant ces neuf dernières années au sein du Pan African Programme dans 46 stations de terrain de 15 pays où vivent des chimpanzés.

Dans ce travail signé par 77 spécialistes figurent des données fournies par Klaus Zuberbühler, directeur du Laboratoire de cognition comparée de l’Unine, récoltées au cours des missions successives qu’il a supervisées dans la Budongo Conservation Field Station en Ouganda.

Outils et techniques

Les comportements pris en compte comprennent les techniques d’extraction et de consommation de termites, de fourmis, d’algues, de noix ou de miel. A quoi s’ajoutent des outils pour chasser, pour creuser la terre à la recherche de tubercules, ainsi que l’utilisation de pierres, ou encore la plongée dans des vasques naturelles ou la fréquentation de grottes pour se rafraîchir en cas de chaleur excessive.

Les comportements des chimpanzés notés dans chacun des sites étaient examinés en fonction d’une variable rassemblant les différentes formes d’impact humain subies et leurs conséquences sur l’environnement. On y trouve la densité de population humaine, le nombre de routes, les surfaces de rivières et de forêts, autant d’indicateurs attestant du changement de paysage dans les habitats naturels de ces grands singes.

«Les analyses ont révélé que les chimpanzés voient leur diversité comportementale réduite à mesure que l’impact humain augmente», explique Ammie Kalan, de l’Institut Max Planck, citée dans le communiqué.

«Cette relation est cohérente, indépendante des groupes observés et de la catégorie des comportements. En moyenne, la diversité comportementale des chimpanzés était de 88% inférieure dans les lieux où régnait le plus fort impact humain par rapport à ceux qui présentaient le plus faible», ajoute la spécialiste.

Héritage culturel à protéger

Plusieurs mécanismes pourraient expliquer cette perte de richesse des comportements. D’abord, la taille de la population: comme pour les humains, plus celle-ci est faible, plus le maintien des caractéristiques culturelles est difficile. Il se peut également que les chimpanzés évitent des comportements peu discrets, comme de casser des noix, qui pourraient informer des chasseurs de leur présence.

La dégradation de l’habitat et la diminution des ressources peuvent aussi réduire les opportunités d’apprentissage social et empêcher ainsi la transmission des traditions locales d’une génération à l’autre. Enfin, les changements climatiques pourraient influencer la production d’importantes sources de nourriture et rendre leur accessibilité imprévisible.

«Nos résultats suggèrent que les stratégies de conservation de la biodiversité devraient s’étendre à la protection de la diversité comportementale des animaux», affirme Ammie Kalan.

Concept étendu

«Tout site où l’on observe un ensemble exceptionnel de comportements devrait être protégé sous l’appellation de ‘Site d’héritage culturel des chimpanzés’. Ce concept pourrait être étendu à d’autres espèces présentant un degré élevé de richesse culturelle, comme les orangs-outans, les singes capucins ou les baleines», estime la primatologue.

Ces propositions vont dans le sens des efforts existants pour la conservation de la biodiversité, comme la Convention sur la diversité biologique et la Convention sur la conservation des espèces migratrices sauvages appartenant à la faune sauvage. Ces conventions appellent à la protection de la biodiversité dans son ensemble, y compris à celle de la diversité des comportements culturels en milieu sauvage.

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