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Multinationales responsables: une bonne initiative?

Le jeudi 13 juin, le Conseil national se penchera sur l’initiative pour des multinationales responsables. Celle-ci veut que la Confédération prenne des mesures légales pour que l’économie respecte les droits humains et l’environnement également à l’étranger. Va-t-elle dans le bon sens? Le popiste Julien Gressot, membre du comité local d’initiative de La Chaux-de-Fonds, et le conseiller national PLR neuchâtelois Philippe Bauer en débattent.

06 juin 2019, 18:00
L'initiative veut que la Confédération prenne des mesures légales pour que l’économie respecte les droits humains et l’environnement également à l’étranger.

Julien Gressot: «Pas farfelue»

Premièrement, il y a une certaine hypocrisie de laisser des entreprises, qui ont soit des filières directes soit des clients uniques à l’étranger, sur lesquels ils ont un contrôle, ne pas respecter les normes helvétiques et de pouvoir continuer de polluer ou d’exploiter des travailleurs et des travailleuses.

Le principe est de rendre les multinationales responsables de ce qu’elles font à l’étranger. L’idée première est que les associations, qui ont connaissance des atteintes environnementales ou aux droits de l’homme, puissent porter l’affaire devant la justice suisse.

Ce serait un nouvel outil. Il permettrait de porter plainte au nom des personnes atteintes. Un mineur sud-américain ou africain n’aura pas l’idée de venir en Suisse pour faire cette démarche.

Cette initiative toucherait uniquement les multinationales. 95% des entreprises et des PME ne seraient pas touchées par cette nouvelle législation. Tout le monde serait sur un pied d’égalité.

Quand on voit les exemples de Nestlé, Glencore, etc., qui agissent en toute impunité, on ne peut pas laisser des entreprises qui on leur siège en Suisse poursuivre sur cette voie. C’est une forme de néocolonialisme.

Sur le plan de la gestion de l’environnement c’est particulièrement important. L’écosystème ne fait qu’un et en laissant les entreprises extraire les ressources de n’importe quelle manière on provoque un désastre non seulement social mais également écologique. Ça touche l’entier de la planète. Cette initiative se justifie d’autant plus que les plus grandes entreprises d’extraction au monde ont leur siège en Suisse.

Je pense que les multinationales ont également tout intérêt, dans une période ou la communication et l’image sont importantes, de montrer qu’elles font attention. Surtout si ce genre de cas pouvait être porté devant un tribunal en Suisse.

Dans plusieurs pays, au Canada, par exemple, des dispositions sont mises en place. Autant prendre les devants et montrer qu’on veut agir également. Cette initiative n’est pas farfelue. C’est novateur et dans l’air du temps.


Philippe Bauer: «Pas les bons outils»

Le groupe PLR considère que toutes les violations des droits de l’homme, que ce soit en matière d’exploitation des enfants, des travailleurs ou de pollution, sont inacceptables et doivent être combattues.

Nous considérons que les buts de l’initiative sont louables. En revanche, et comme souvent malheureusement, les outils que l’initiative veut introduire dans notre droit ne sont pas les bons. Par exemple, l’initiative introduit une responsabilité solidaire de l’entreprise pour tous les sous-traitants. Concrètement, cela signifie qu’une entreprise peut être tenue pour responsable des actes de ses sous-traitants, et ce même si elle les a correctement choisis, instruits et contrôlés.

Cette initiative s’appliquera à toutes les entreprises quelle que soit leur taille. Or, les multinationales pourront toujours déplacer leur siège pour éviter les rigueurs de la loi suisse. Par contre, toutes les PME suisses qui auraient des relations d’affaires avec des sous-traitants à l’étranger qui ne respecteraient pas la loi suisse, pourraient être sanctionnées.

De plus, cette initiative introduit une présomption de faute, contraire aux principes généraux du droit suisse prévalant en matière de responsabilité civile. Il appartient, en effet, en général à la partie qui se prétend victime d’une faute d’en apporter la preuve.

Nous privilégions les instruments qui existent déjà, notamment les plans d’action de l’ONU pour des entreprises responsables et pour l’économie et les droits de l’homme, de même que celui du Conseil fédéral qui vise à favoriser l’économie verte et la responsabilité sociétale des entreprises.

Je relève encore que les horlogers appliquent souvent, d’une manière volontaire, un certain nombre de dispositions de droit international qui réglementent, par exemple, les problématiques liées à la production d’or ou à l’utilisation de la peau de reptiles. Ils estiment, en effet, qu’il est de leur responsabilité de respecter ces règles et que dans la négative, la pression de la société et des médias serait trop forte.

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