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Parti du Jura pour le Canada il y a 42 ans, il raconte les exilés

Franc-Montagnard né à La Chaux-de-Fonds, Bernard Wilhelm a mis le cap sur le Canada il y a 42 ans, avec femme et enfants, après 20 ans d'enseignement et une thèse sur Malraux et Hemingway. Homme de lettres, il a contribué à l'ouverture d'une université à Regina, dans le Saskatchewan. La famille n'est plus revenue, sauf pour les vacances.

08 oct. 2009, 04:15

Installé avec une poignée d'amis de l'époque, Bernard Wilhelm nous accorde un moment à une table de l'auberge de La Couronne, à La Theurre. Le temps de partager quelques souvenirs et de nous expliquer comment il est parti dans un nouveau monde à construire, le Saskatchewan, il y a 42 ans. Dans un livre personnel, il fait honneur à des exilés de tous bords, restés oubliés (encadré).

«Arrivé à 40 ans, je venais de boucler ma thèse et j'avais envie de commencer une nouvelle vie. A ce moment-là, l'Empire britannique lançait des appels pour peupler les vastes prairies du Canada, comme le Saskatchewan.» Alors socialiste, il s'est dit que de se rendre dans la seule province travailliste du Canada, qui venait de se battre pour obtenir l'accès aux soins gratuits, pouvait être intéressant du point de vue «lutte syndicale».

Bernard Wilhelm a donc quitté le Jura avec sa femme, Américaine, et ses trois enfants, pour aller s'installer dans la ville de Regina. «C'était en 1967 et le Canada avait décidé d'ouvrir six ou sept nouvelles universités, dont celle du Saskatchewan. Il fallait tout commencer à zéro, construire, puis mettre en place les programmes. Et ce qui est fou, c'est qu'il y avait de l'argent pour ça!» Le Jurassien a monté un Institut de formation linguistique et instauré un échange d'étudiants avec le lycée de La Chaux-de-Fonds. Aujourd'hui, le campus de Regina accueille 11 000 étudiants.

Au milieu des plaines du Saskatchewan, la famille Wilhelm a peu à peu pris ses marques, comme les milliers d'immigrés venus s'installer dans ce coin de pays. «Le Royaume-Uni offrait ses terres presque gratuitement. Beaucoup d'étrangers, d'Europe et d'ailleurs, sont venus tenter leur chance là-bas dans l'agriculture. Certains ont prospéré, d'autres n'ont pas su se débrouiller dans ce climat continental où il fait +40° en été et -40° en hiver.»

Grand comme une fois et demie la France, la province n'héberge qu'un million d'hommes et de femmes. «Nous avons découvert une nouvelle civilisation. Non seulement formée d'immigrés, mais aussi des tribus indiennes, qui représentent peut-être 10 ou 20% de la population.»

La cohabitation, une question sensible. Pour la régler, le Canada s'est doté d'un Ministère des affaires indiennes. Il y a 20 ans, un programme a été mis en place pour scolariser les enfants des Indiens. «Ils ont été arrachés à leurs familles et placés dans des instituts, protestants ou catholiques. Tout cela a débouché sur des tas de problèmes de drogues, d'alcool ou sexuels.» Au final, l'Etat a versé 5 milliards de dollars de compensation aux tribus. Et la question n'est toujours pas réglée. Mais Bernard Wilhelm a conservé son espoir d'antan. /DWI

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