Survenu en 1912, le naufrage du «Titanic» marque encore les esprits aujourd’hui. Alors qu’un milliardaire australien prépare activement la construction d’une réplique exacte du paquebot, le Nouvel Ensemble contemporain (NEC) et les élèves de la Haute Ecole de musique (HEM) se préparent à rendre hommage au mythique paquebot de manière un peu moins mégalomane, mais bien plus intéressante. Samedi, en coproduction avec la Société de musique de La Chaux-de-Fonds, ils joueront une pièce du compositeur britannique Gavin Bryars, écrite entre 1969 et 1972 et intitulée «The Sinking of the Titanic» (le naufrage du «Titanic»).
«Cette pièce est basée sur la légende selon laquelle les musiciens du «Titanic» ont continué à jouer tandis que le bateau coulait», raconte Antoine Françoise, directeur artistique du NEC. Elle comprend la diffusion d’enregistrements de récits de rescapés du naufrage. «Je réalise un rêve d’adolescent. J’ai découvert cette pièce à l’âge de 12 ans. Il y a trois ans, je l’ai entendue en live à Londres. C’est un morceau relativement facile d’écoute, mais qui ne laisse pas indifférent.»
Un appel depuis la campagne anglaise
Gavin Bryars «est un ovni de la composition classique. Il est aussi contrebassiste de jazz et a évolué dans le monde du rock, notamment avec Tom Waits et Brian Eno», précise le directeur artistique du NEC. Une autre œuvre du compositeur sera proposée, intitulée: «Jesus Blood Never Failed Me Yet» (en français, «le sang de Jésus ne m’a encore jamais déçu»). Elle est construite à partir de cette simple phrase, chantée par un clochard que le compositeur avait enregistré dans les rues de Londres.
Pour monter ce répertoire, Antoine Françoise a contacté Gavin Bryars en passant par son agent. «Il m’a appelé depuis son cottage dans la campagne anglaise. On s’est parlé par Skype, j’étais assez intimidé… Il ne peut pas venir au concert de La Chaux-de-Fonds, mais il sera présent à celui que nous donnerons à Genève.»
Un naufrage symbolique
Pour compléter ce récital, un troisième morceau sera joué: «Palindrome», écrit l’an dernier par le jeune compositeur Mathis Saunier. «C’est un guitariste de rock, fasciné par le cinéma», explique le directeur du NEC. «Son idée est simple: il a voulu peindre un arbre en musique. D’abord les racines, puis le tronc, et enfin, les branches qui s’ouvrent.» Pour l’instant, «Palindrome» n’a été présentée qu’une seule fois en public. «Ce sera donc une deuxième mondiale.»
Jouer «Le naufrage du Titanic» avec des élèves de la HEM, une école qui pourrait bientôt fermer, faut-il y voir un symbole? «Notre collaboration a été décidée avant l’annonce de la fermeture», détaille Antoine Françoise. «C’est vrai que, maintenant, la pièce prend une autre dimension… Tous les membres du NEC sont passés par la formation professionnelle donnée dans ce canton. Pour moi, détruire complètement l’enseignement professionnel dans ce canton, c’est tuer la culture.»
Théâtre des Abeilles, Numa-Droz 120, à La Chaux-de-Fonds, samedi 2 février. Présentation à 18h45, concert à 19h30.