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La Chaux-de-Fonds: Nimrod Kaspi, s'en est allé après une vie engagée auprès des plus faibles

Inlassable défenseur des laissés-pour-compte, le Chaux-de-Fonnier Nimrod Kaspi, fondateur de Partage, est décédé, six mois après sa retraite.

07 nov. 2019, 15:39
Nimrod Kaspi, figure libertaire des Montagnes neuchâteloises.

«Get up, stand up, stand up for your rights! (…) Don’t give up the fight!» (Lève-toi, debout, lève-toi pour tes droits! (…) N’abandonne pas le combat!)

Nimrod Kaspi aimait reprendre le refrain de l’hymne aux opprimés de Bob Marley. Mais comme l’icône jamaïcaine, ce défenseur des laissés-pour-compte n’a pu vaincre le cancer contre lequel il a lutté pendant un an. Il s’est éteint, dans la nuit de mardi à mercredi, à la Chrysalide. Paisiblement, entouré des siens, grâce à des soins palliatifs respectueux.

Conviction et ténacité, du kibboutz à La Chaux-de-Fonds

Cet Israélien d’origine était pourtant une force de la nature, une nature humaine. Fils d’émigrés juifs ayant fui une Pologne d’avant-guerre déjà en proie à l’antisémitisme, il a été élevé dans un kibboutz socialiste communautaire. Il s’est pourtant très tôt senti en marge de son groupe d’enfants. Ce qui explique sans doute son engagement contre l’exclusion.

Le garçon s’est replié sur lui-même, avec un seul ami – un poulain orphelin – et ses mains pour s’exprimer, avec lesquelles il s’est mis à bricoler avec un certain génie mathématique.

Ce gamin différent s’est ouvert au monde et aux autres à l’adolescence, avec le vent de liberté et l’explosion musicale des années 1960-1970. Et vite rebellé contre l’ordre établi, même s’il a fait son service militaire dans son pays en guerre. Il nous a raconté être allé jusqu’à la cour suprême pour obtenir que la religion juive ne soit pas obligatoirement inscrite sur ses papiers d’identité. Ni Dieu ni maître, avec la volonté de changer le monde, pour un monde de paix.

Pour les sans-papiers, contre les avions de combat

Nimrod Kaspi est venu en Suisse où il a épousé Catherine, une Chaux-de-Fonnière qui avait travaillé comme volontaire dans son kibboutz. Entre petits boulots alimentaires et travaux manuels dans une de ces communautés qui fleurissaient alors, le jeune adulte s’est engagé dans toutes les causes du moment: Touche pas à mon pote, les sans-papiers, pour une Suisse sans armée, contre les avions de combat F/A-18.

A force de conviction et de ténacité, son engagement est devenu social et professionnel. Le Chaux-de-Fonnier d’adoption a créé en 1987, dans un édicule au milieu du Pod, le premier programme d’occupation pour les chômeurs des Montagnes neuchâteloises, la friterie Le Tournesol. Le premier kebab de la ville en quelque sorte.

ADC, Tricouti, Partage

Mais c’est en 1994, après la fermeture abrupte de la fabrique Calida, qu’il se lance vraiment, en fondant l’atelier de couture Tricouti, devenu aujourd’hui Les Couturiers du temps, un programme phare d’insertion du canton. «Pour ces ouvrières arrivées en fin de droits au chômage, il n’existait rien ou presque», nous disait en avril Nimrod Kaspi, à l’occasion d’une retraite dont il n’aura rien vu.

Nimrod Kaspi s’est aussi investi comme président (13 ans) de l’Association de défense des chômeurs. Comme l’a écrit sur Facebook sa fille Oriah, «des recours, tu en as gagné pour les chômeurs délaissés».

Plus récemment, celui qui s’est toujours attaché à aider lucidement les plus faibles, est aussi à l’origine de l’ouverture du local de distribution alimentaire Partage, du nom de la coopérative qu’il avait fondée bien plus tôt avec quelques autres libertaires.

Bon vent, camarade!

Quand on lui demandait il y a six mois le meilleur souvenir de son engagement, il a répondu: «Quand on a gagné le référendum lancé par une poignée de Chaux-de-Fonniers contre une ixième révision de la loi fédérale sur le chômage, en 1997».

Personne n’est irremplaçable? Avec son accent inimitable, son allure de métèque, son opiniâtreté de pas si vieux sage, son sens de l’humour aussi (ah, ses blagues juives!), Nimrod Kaspi l’est. Sûr qu’il aurait aimé qu’on lui souhaite un amical «bon vent, camarade!»

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