Benoît XVI aurait-il fait une bulle en nommant in petto «bienheureux»
son prédécesseur Jean Paul II? Le statut de bienheureux, c'est la voie
royale et divine qui mène droit à la sainteté. Moi, les saints, je les
aime bien parce qu'ils entretiennent une esthétique de l'extraordinaire
et du merveilleux. Surtout, ils nous foutent la paix aux côtés d'un Deus
otiosus, un dieu caché qu'il vaut mieux ne pas invoquer, puisque
l'homme n'arrête pas de guerroyer en son nom. Ce que j'aime bien chez le
saint, c'est qu'il est un homme d'ici habitant les arrières-mondes. On
les convoque comme les dieux de l'instant, chez les Romains, celui de
l'érotisme, du plaisir ou du clin d'½il à ses amis disparus de notre vue
et qui, tout à coup, nous envahissent l'esprit et nous font du bien.
«La vie des Saints du Jura» de Pierre-Olivier Walzer nous offre un
superbe exemple de sensualité et d'érudition iconophile. Parmi ces
enjolivures de l'esprit, moi je les aimais les saints, jusqu'à l'autre
jour, où Jean Paul le Second a été mis sur la marche des bienheureux.
Pourquoi le grand faiseur de ponts, le pontifex a-t-il choisi le
souverain pourfendeur de l'avortement et cachottier de bénitier sur les
enfants touchés par la grâce comme candidat aux pouvoirs célestes? Il ne
lui reste plus qu'à vouer l'abbé Pierre et mère Teresa aux gémonies.
Côtés prêtrise, il en est un, le père Aristide, ancien dictateur, qui
rêve de se retrouver en odeur de sainteté en Haïti pour reconfisquer ce
qui reste du saint-frusquin du pays. En attendant, je ne puis que me
borner à cette sainte béatitude: «Bienheureux celui qui sait rire de
lui-même, car il n'a pas fini de rire».
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