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Le ver est dans le gris

08 nov. 2011, 10:37

Dans notre enfance, on se mettait au défi de deviner la couleur de la prochaine voiture qui déboucherait du virage. Un jeu hautement intellectuel, j'en conviens, qu'aujourd'hui je gagnerais presque à coup sûr, me disais-je l'autre jour en observant le flot du trafic à une heure dite de pointe. Grises, avec une prédilection pour le gris clair, noires, blanches; blanches, noires, grises...

Le gris a beau s'acoquiner avec le bleu ou le vert, les carrosseries font profil bas, miroir où vient se refléter notre discrétion tout helvétique. Ou sommes-nous à ce point ternes et ennuyeux, comme me souffle un collègue qui passait par là? Le ver est dans le fruit, la question perfide nous pousse sur la piste savonneuse des conjectures et de la digression. Symbole de la tristesse, le gris n'est-il pas choyé aussi pour sa suprême élégance? Et si le blanc et le noir traduisaient un goût raffiné pour l'épure?

«Pourquoi une merde de pigeon sur une voiture noire, c'est blanc, et sur une voiture blanche, c'est noir?», s'interrogeait le professeur Rollin avec une pertinence éminemment scientifique. Et sur une voiture grise? C'est dit, on attribue le gris aux crasseux, le blanc et le noir aux obsédés de la poutze et du chrome rutilant, renvoyés à leur vide existentiel si on leur arrachait des mains la peau de chamois et la lance de l'hypromat.

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