Votre publicité ici avec IMPACT_medias

De la crème glacée répandue sur un trottoir au parfum d'enfance

08 juin 2009, 10:42

Cheminant sur le Pod vers un rendez-vous, je - après tout, osons le «je» - marque un imperceptible temps d'arrêt. A mes pieds, une substance rose s'étale, comme la trace laissée par un escargot géant d'Aldébaran. Une crème glacée a fini sur le bitume une vie qui devait réjouir un palais d'enfant. Aussitôt, l'ampleur du drame m'apparaît. La bouche salive, la langue se tend. «Fais attention», dit la mère - ou la tante, ou la grand-mère - qui esquisse un geste qui se veut protecteur et qui n'est que fatal. Involontairement bousculé le bras de l'enfant se tord un peu, le panache glacé, promesse de délice sucré et rafraîchissant s'écrase au sol, proie facile pour le soleil estival. L'instant de stupeur passé, les larmes jaillissent. Le drame est consommé. La trace rose me relie à cet instant au souvenir du même supplice. C'est pour cela, peut-être gambergé-je, que beaucoup plus tard, attentif aux récits de la mythologie transmis à l'école, je fus si frappé par l'histoire de Tantale: la crème glacée qui se dérobe au coup de langue si convoité serait comme une figure parfaite de cette parabole. Du coup, remontent d'autres souvenirs de cette enfance chaux-de-fonnière, des flashes sans aucun rapport avec la crème glacée qui salit le trottoir. Ou peut-être si. Le drame du bambin endimanché pour les Promos, qui étale maladroitement son ice-cream sur son beau costume fait sur mesure de chez les frères Lyssak, ce magasin de confection où s'habillait la moitié des gosses de la ville au temps où les grands magasins n'offraient que peu de choix aux parents désireux de faire briller leur progéniture, le voilà à son tour relié à l'expérience du jour.

Votre publicité ici avec IMPACT_medias