De l'apparition des minons dans les nombrils masculins

Au même titre que l'extinction présumée de la lumière du frigo, la disparition des petites cuillères appartient aux grands mystères ménagers. Un singulier phénomène qui voit l'ustensile franchir à jamais la frontière d'un monde parallèle, une fois le tiroir refermé.

Mais si ces disparitions interpellent, certaines apparitions ne le leur cèdent rien en matière d'étrangeté. Ainsi en est-il de celle quasi christique des minons dans les nombrils masculins. Une génération spontanée textile qui provoque l'admiration des femmes, privées du phénomène. Envieuses, celles-ci ne manquent par conséquent pas de formuler nombre d'hypothèses pour minimiser le prodige. Largeur ou profondeur du cratère ombilical, qualité discutable des tissus. Les plus perfides vont jusqu'à prétendre que l'absence d'abdominaux favorise l'amalgame pelucheux.

Tout cela, c'était avant Georg Steinhauser. Après s'être longuement regardé le nombril, ce matheux autrichien a démontré le rôle crucial de drain joué par le système pileux dans la genèse de pelotes. D'où l'absence de minons chez les femmes, les glabres, les épilés. Las, si la connaissance a progressé, le charme s'est rompu. De poésie pourtant, les scientifiques n'en sont pas toujours dépourvus. A l'instar de ceux qui se sont penchés sur la disparition des petites cuillères. A défaut d'explication tangible, ils n'ont pu qu'évoquer le «résistancialisme», théorie qui prête aux objets inanimés une aversion naturelle pour les êtres humains. Le mystère reste entier.