Tous les matins, lorsque je me rends au travail, je croise la même personne sur son vélo. Une rencontre qui me permet de savoir si je suis à l'heure ou plutôt un chouia à la bourre. Parce qu'on doit avoir les mêmes horaires, je sais selon l'endroit où je la croise, que je dois appuyer mon coup de pédale ou que je peux laisser flageoler mes mollets.
Vous avez déjà remarqué, ces gens qui vous donnent l'heure sans qu'on la leur demande? Plus j'y réfléchis, plus je me dis qu'au pays de la trotteuse, les Suisses sont les gens qui ont le moins besoin de montre, réglés qu'ils sont comme des horloges.
Si je remonte plus tôt dans ma matinée, je sais quand j'entends piailler les canaris du magasin d'animaux, qu'il vient d'ouvrir et que je dois enfiler mes chaussures. Quand j'entends le camion de livraison, me lever. Quand j'entends la porte claquer, me rendormir. Quand la musique s'arrête dans la rue, que je dois vraiment arrêter de lire.
Sans compter l'heure sur mon téléphone, mon réveil, mon ordinateur, dans la rue, chez le boulanger, suivant la position du soleil.
Alors pourquoi encore s'inquiéter de porter le temps au poignet? Peut-être parce que j'ai peur que quelqu'un compte sur moi pour lui donner l'heure Parce que parmi tous ces Suisses, il reste d'irréductibles retardataires.
