Parfois, on trouve un paquet sur son bureau, au boulot. En général, un envoi de livres en promo. On y jette un coup d’œil… «Vous n’aurez pas les enfants», le titre accroche. En dessous, une image noir blanc d’une petite fille qui tient un panneau: «Leibowitz Céline 19.4.36». Le décor est planté.
Sur 220 pages, l’historienne Valérie Portheret décrit un incroyable sauvetage d’enfants et d’adultes. Au début de l’été 1942, on est au pic génocidaire. Le gouvernement de Vichy, afin de répondre aux exigences des nazis, ordonne la rafle de Juifs étrangers dans la région de Lyon. Le 26 août, ils sont 1016 à être transférés au camp de triage de Vénissieux. Parmi les captifs, 108 enfants.
Il faut faire vite, car le départ en direction d’Auschwitz est pour la nuit du 28 au 29 août. Une circulaire spécifie que les enfants de moins de 16 ans non accompagnés ne seront pas déportés. Et c’est là qu’un incroyable réseau de gens d’Église de toutes confessions, de résistants et d’associations de secours échafaude un plan: faire signer des actes d’abandon aux parents afin de sauver les enfants.
Ce qui devait être le sujet de thèse de Valérie Portheret est devenu une recherche menée sur 25 ans – un devoir de mémoire – pour reconstituer les faits, recueillir partout dans le monde, la parole de ses enfants exfiltrés. Qui pour certains entendront toute leur vie «les cris des mères, des pères qui se perdent dans la nuit…». Qui ne reverront plus leurs parents.
Au lendemain de ce sauvetage de fin août 1942, des tracts signés «Les Mouvements de Résistance» sont placardés dans Lyon. Titrés: «Vous n’aurez pas les enfants».