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Une formation en droit des brevets à Neuchâtel grâce au cabinet P&TS

Christophe Saam, fondateur du cabinet P&TS spécialisé dans le domaine de la propriété intellectuelle explique comment il s’en sort pour recruter. En effet, bien que la Suisse se place au premier rang mondial des demandes de brevets auprès de l’Office européen, en fonction de sa population, la formation y est paradoxalement pauvre.

09 déc. 2019, 15:14
Christophe Saam, fondateur du cabinet de conseil en brevets et marques P&TS.

Un détail a rendu la date inoubliable: le lendemain de la chute du Mur de Berlin, Christophe Saam lit le compte rendu des événements dans le «Nouveau Quotidien», un journal aujourd’hui disparu. Nous sommes en novembre 1989 et le Neuchâtelois passe son dernier examen à l’EPFL, en électricité. Un peu plus loin, dans les pages, figure une offre d’emploi pour l’Office européen des brevets à Berlin. Il y passera quatre ans, au terme desquels il suit encore une formation juridique à l’Université de Strasbourg, pour obtenir le diplôme «Contentieux des brevets en Europe».

C’est crucial de trouver les bonnes personnes. Pour notre bureau de Zurich, il nous a fallu plus d’une année, avec l’aide d’un chasseur de têtes qui œuvre au niveau européen, avant de finalement dénicher la perle rare.
Christophe Saam, fondateur du cabinet P&TS

C’est le début d’une carrière atypique, qui le verra fonder en 1999 le cabinet spécialisé dans les brevets P&TS, aujourd’hui l’un des plus importants de Suisse actifs dans la propriété intellectuelle (PI), avec une trentaine de collaborateurs et quelque 400 clients. Il est également juge technique au Tribunal fédéral des brevets. Mais ce domaine d’activité extrêmement pointu cache quelques écueils. A commencer par la formation, pauvre en Suisse. Une situation paradoxale, lorsque l’on sait que le pays, champion de l’innovation, se place au premier rang mondial des demandes de brevets auprès de l’Office européen, en fonction de sa population. Christophe Saam explique comment il s’en sort pour recruter.

Comment est née la société P&TS?

C’était en 1999. Nous vivions alors une année charnière, qui a vu plusieurs secteurs se libéraliser. Notre profession d’abord: auparavant, des règles strictes encadraient l’exercice de cette activité, où il était interdit de faire de la publicité et pour laquelle les tarifs étaient figés. Tout cela est tombé. De leur côté, les télécoms ont eux aussi bénéficié d’une déréglementation. Avec pour conséquence une subite et importante demande dans le domaine de la protection des logiciels pour les sociétés. Or à l’époque, il existait principalement des cabinets généralistes. Nous nous sommes engouffrés dans cette niche.

Cela a-t-il suffi pour décoller?

Grâce aux télécoms, nous avons grandi jusqu’à employer huit personnes en 2004. P&TS était alors fortement dépendante de trois ou quatre clients importants. C’était une faiblesse, mais également une chance formidable, dans le sens où ce n’est pas tous les jours que l’on peut devenir le nouveau conseil en PI d’une grande société. Puis l’opportunité s’est présentée de nous rapprocher d’un bureau bernois spécialisé dans les marques, Koster&Partner. Une société qui n’a pas été fusionnée, mais qui subsiste aujourd’hui sous le nom de P&TS Marques SA.

Y a-t-il eu d’autre relais de croissance?

Les écoles et les start-up! Au milieu des années 2000, la volonté politique pousse les universités et les EPF à intensifier leurs efforts en matière de transferts technologiques vers l’industrie, pour que la recherche cesse de rester confinée dans les laboratoires. Les start-up vont alors se multiplier, avec leur cortège de pépinières, de parcs technologiques et d’incubateurs. Un phénomène qui s’est naturellement accompagné d’une forte demande en brevets. Aujourd’hui, ce secteur représente le tiers des activités de P&TS, faisant de nous le leader suisse dans le domaine.

Vous êtes maintenant une trentaine de personnes chez P&TS. Quel est le profil type de vos employés?

La plupart ont une double formation, technique et juridique. Il faut à chaque fois être capable de comprendre une invention, puis de rédiger le brevet en des termes légaux. P&TS emploie également une dizaine de collaboratrices et collaborateurs administratifs, très spécialisés eux aussi: nous travaillons dans 65 pays avec des bureaux locaux. Il y a un énorme travail de traduction, de coordination, de surveillance… Et maîtriser les langues ne fait pas tout, il y a une dimension culturelle à surmonter. C’est la raison pour laquelle une quinzaine de nationalités se côtoient ici.

Le recrutement doit être compliqué…

Nous aimerions trouver des gens directement formés, mais ils n’existent pas. C’est la raison pour laquelle P&TS coordonne une formation de base en droit européen des brevets à Neuchâtel, en collaboration avec des formateurs de Nestlé, du Pôle de propriété intellectuel et d’innovation de l’Université de Neuchâtel, ainsi qu’avec un bureau d’avocats. Ce cours a été mis sur pied conjointement avec le Centre d’études internationales de la propriété intellectuelle de l’Université de Strasbourg et l’Institut des mandataires agréés près l’Office européen des brevets (EPI). C’est en cours du soir, sur deux ans. Douze personnes le suivent cette année. Cela profite à tout le monde en Suisse romande!

Et sur quoi débouche cette formation?

Sur une simple attestation. Mais elle est surtout une excellente préparation à l’examen de l’EPI, pour devenir mandataire auprès de l’Office européen.

Il est donc difficile de trouver de bons candidats…

C’est crucial de trouver les bonnes personnes. Pour notre bureau de Zurich, il nous a fallu plus d’une année, avec l’aide d’un chasseur de têtes qui œuvre au niveau européen, avant de finalement dénicher la perle rare.

Et dans le domaine administratif?

C’est pareil. Ce métier s’appelle Patent Formalities Officer. Il est reconnu en Allemagne, en France, mais pas en Suisse. Ici, des employés de commerce ou des juristes l’apprennent sur le tas. Mais ce travail est très spécialisé, avec des notions de droit, la maîtrise des langues, etc. Une formation spécifique va donc également démarrer en 2020 à Zurich, en collaboration avec la ZHAW School of Management and Law et cinq associations professionnelles.

Combien y a-t-il de cabinets comme le vôtre dans le pays?

Il y a beaucoup de bureaux qui n’emploient qu’une ou deux personnes. Je dirais une cinquantaine. Et une quarantaine de sociétés avec plus de huit personnes. En tout, la Suisse compte quelque 500 mandataires agréés, la moitié dans l’industrie et l’autre dans des cabinets généralistes. Ce qui place le pays largement en tête de classement européen par habitants.

Et dans le canton de Neuchâtel?

Il y a eu un grand mouvement de concentration: nous sommes passés de sept à quatre bureaux. Au total, le secteur de la PI emploie une centaine de personnes. Il y a beaucoup à faire avec l’horlogerie, le CSEM, l’université, PMI…

Comment expliquer cet engouement pour la propriété intellectuelle?

La PI a toujours existé. Mais sa visibilité est beaucoup plus importante qu’avant: de gros litiges aux États-Unis, dans la pharma par exemple, ou entre Apple et Samsung, avec parfois des milliards de dollars en jeu, y ont contribué. Les gens s’y intéressent davantage.

Le secteur va donc continuer à grandir…

Oui. Cette activité est de plus en plus stratégique pour les entreprises, tout comme la gestion de l’innovation. Nous vivons dans un monde ouvert aujourd’hui, où les inventions sont partagées, les partenariats parfois obligatoires pour avancer. Il y a 20 ans, on avait plutôt tendance à s’emmurer pour que rien ne sorte… Les domaines qui jusqu’ici n’utilisaient pas la PI vont se lancer. L’électronique et les logiciels sont notamment en retard.

Et comment va évoluer P&TS?

Le domaine de l’art, de la création nous intéresse. Les artistes souffrent passablement de la contrefaçon ou du vol d’œuvres. Ce sont des professions qui ne sont pas aussi bien protégées ni organisées que l’industrie. P&TS va se développer là-dedans.

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