Un duo de toute beauté
A partir de quand peut-on dire d’un artiste qu’il a construit une œuvre? Dès le moment où la profondeur et la cohérence de l’ensemble se dégagent. C’est le cas du pianiste de jazz Thierry Lang qui nous enthousiasme depuis des décennies avec ses différents projets, qu’ils soient discographiques ou scéniques.
Le Fribourgeois établi à Ollon revient aujourd’hui avec un album en duo avec son vieux complice, le contrebassiste Heiri Känzig, autre figure helvétique internationalement reconnue du jazz. Son titre, «Celebration», ne doit rien au hasard: il consacre le quart de siècle de collaboration entre les deux musiciens.
Et c’est peu dire qu’ils se sont trouvés. Car l’intensité et la profondeur de leurs interprétations bouleversent dès les premières mesures de «Tender Waltz», la magnifique ballade qui ouvre l’album. Le reste est à l’avenant, autrement dit de toute beauté.
«Celebration», Thierry Lang et Heiri Känzig, Universal Music.
Dans le labyrinthe des secrets de famille
Chaque famille, ou presque, cache un ou plusieurs secrets. Tous ne sont pas forcément inavouables et capables de faire exploser la structure, mais dans le dernier livre de Robert Goddard, c’est le cas, évidemment. Et à un point que le lecteur, même familier de l’œuvre du romancier anglais, ne peut soupçonner à l’entame des premières pages. L’auteur s’est pourtant fait une spécialité de ces intrigues tortueuses qui couvrent souvent plusieurs générations, comme ici dans «L’héritage Davenall», dont les protagonistes évoluent dans l’aristocratie victorienne.
L’histoire commence lorsqu’un certain James Norton se présente chez William et Constance Trenchard, en prétendant être l’ancien fiancé de la jeune femme, disparu juste avant leur mariage et déclaré mort depuis. Dit-il la vérité? Est-il un imposteur? Sans trahir la conclusion, on dira que la vérité se situe entre les deux. Et encore, on est loin du compte. Car ce roman entraîne ses personnages comme les lecteurs dans un labyrinthe oppressant. Personne n’en sortira indemne.
«L’héritage Davenall», de Robert Goddard, éditions Sonatine.
Et vous, qu’en pensez-vous?
Il paraît que Pascale Seys est une des Belges les plus connues à l’étranger, en tout cas dans le monde francophone. Il est vrai que cette philosophe fait un tabac depuis qu’elle tient, tous les jeudis sur Musiq3 (une des radios de la RTBF), une petite capsule baptisée «Les tics de l’actu». Trois minutes de philosophie vagabonde qui abordent tous les sujets possibles et imaginables, à commencer par les grandes questions de l’époque. Trois minutes durant lesquelles on peut mesurer l’érudition profonde d’une Pascale Seys qui n’assène pourtant jamais de leçon. Comme quoi on peut faire preuve d’une intelligence rayonnante tout en s’adressant à tout le monde. Le ton est empathique, la voix chaleureuse. «Et vous, qu’en pensez-vous?»: c’est par cette phrase que se terminent toutes les chroniques de cette amie radiophonique qui nous invite à prolonger nos réflexions avec elle, bien au-delà des trois minutes dévolues à l’émission. Brillant.
«Les tics de l’actu», Musiq3 (RTBF), en podcast sur le site de la chaîne et sur Facebook.