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Point de vue de Nicole Baur: «Quelle mémoire?»

Le nom de Louis Agassiz est sur toutes les lèvres, celui de Tilo Frey pas, regrette Nicole Baur, cheffe de l’office neuchâtelois de la politique familiale et de l’égalité. Elle revient sur son parcours. Découvrez son point de vue: comme d’autres personnalités locales, nous l’invitons à s’exprimer régulièrement sur des sujets d’actualité.

18 sept. 2018, 14:00
Tilo Frey, trop féministe pour la droite, trop à droite pour la gauche, selon Nicole Baur.

Le remplacement du nom de Louis Agassiz par celui de Tilo Frey agite le landerneau intellectuel et politique de ce canton… Alors que l’on souhaitait rendre hommage à cette première conseillère nationale, presque tombée dans l’oubli, seul son nom à LUI est sur toutes les bouches. D’ELLE, personne ne rappelle le parcours, les combats, le courage et la singularité.

Noire africaine de mère, Tilo Frey a appris vivre avec ses "différences". Et elle détonne en effet dans la Suisse des années 1960-1970. Sur les photos d’abord, non seulement par sa couleur de peau, ses cheveux, mais également par le choix de ses vêtements.

Alors que la consigne a été donnée aux 11 premières femmes élues sous la coupole fédérale, en 1971, de s’habiller de sombre, elle choisit un costume blanc, qui fera jaser plus d’un journaliste (homme à l’époque, évidemment!). Le commentateur de la TSR ose même le terme de "virginité parlementaire (sic!)".

Femme et métisse dans un parti de droite, elle ne correspondait en rien au stéréotype féminin de l’époque: sans mari, sans enfants, directrice d’école, ambitieuse… trop féministe pour la droite, trop à droite pour la gauche. Après des succès électoraux fulgurants (elle aurait dû être la première conseillère communale de la ville de Neuchâtel si les membres de son parti avaient respecté la consigne…), Mademoiselle Tilo Frey, comme on disait à l’époque, sera désavouée. "Elle en voulait trop" jugera la presse…

Que l’on remplace aujourd’hui une adresse qui porte le nom d’un scientifique, connu pour ses thèses racistes, par une pionnière, réunissant à elle seule les aspirations d’émancipation de deux catégories humaines si longtemps opprimées, me paraît être un très joli clin d’œil d’une ville gouvernée, pour la première fois de l’histoire, par une majorité féminine…

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