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Diagnostiquer l’apnée du sommeil chez soi

Similaire à une ceinture de cardio, disponible en location dans les pharmacies, le dispositif connecté de Netsensing Technology permet de diagnostiquer une personne en une nuit, chez elle. Une petite révolution.

24 juin 2020, 05:30
Raja Yazigi (à droite) et Philippe Koller, fondateurs de Netsensing, ont développé un dispositif léger et connecté, capable de diagnostiquer l’apnée du sommeil.

«Notre rêve est de faire de Neuchâtel le centre européen du sommeil!» En une phrase, le programme et les ambitions de Netsensing sont posés. Actifs depuis de nombreuses années dans la micro-électronique et les capteurs, Raja Yazigi et Philippe Koller ont développé un dispositif léger et connecté, capable de diagnostiquer l’apnée du sommeil. Avec une prévalence mondiale de 15%, ce syndrome peut, dans sa forme la plus sévère, conduire à des accidents vasculaires-cérébraux (AVC) ou des infarctus. Or, chez nous, seuls quelques hôpitaux, dont Berne, Lausanne et Bâle, sont équipés d’un centre des troubles du sommeil. De plus, des délais d’attente importants (jusqu’à une année), un équipement lourd et l’obligation de passer une nuit – voire plus – sur place font de ces examens une démarche coûteuse et inconfortable. «Notre invention va disrupter ce procédé», se réjouit Philippe Koller. Louées en pharmacie, deux ceintures se plaçant sur le thorax et l’abdomen fournissent en effet, en une nuit et à la maison, toutes les données nécessaires à un diagnostic précis, via une app et un cloud. De quoi faire de Netsensing, à terme, un centre mondial de compétences.

La «mort subite» de l’adulte

C’est en Chine, en 2010, que l’idée d’un analyseur de sommeil est née. Les deux futurs associés y travaillent alors pour une entreprise suisse spécialisée dans la micro-électronique. «Un jour, un collègue et ami chinois nous apprend qu’il a failli perdre son bébé d’un arrêt respiratoire durant le sommeil, explique Philippe Koller. L’enfant n’a eu la vie sauve que grâce au réflexe de sa mère, qui est intervenue à temps.» L’intention de départ était alors de développer un système de surveillance pour nouveau-nés. Avant de bifurquer, en 2017, sur les manifestations du même mal chez l’adulte. «Nous nous sommes rendu compte que la mort subite, chez l’adulte, est beaucoup plus fréquente. L’apnée du sommeil tue plus que la fumée!»

Ce syndrome se caractérise par des épisodes fréquents d’interruption ou de réduction de la respiration durant le sommeil. Ces pauses durent de 10 à 30 secondes, voire plus, et peuvent se répéter une centaine de fois par nuit. Elles sont dues, la plupart du temps, à des obstructions complètes ou partielles des conduits respiratoires de l’arrière-gorge. En faisant baisser le taux d’oxygène dans le sang et en provocant une multitude de micro-réveils, l’apnée du sommeil provoque un stress important pour le cœur et le cerveau. Un dérèglement qui peut induire finalement du diabète, de l’anxiété ou de la démence, voire mener, dans le pire des cas, à un AVC ou un infarctus.

Un matériel léger

En 2019, le binôme fonde Netsensing Technology Sàrl avec des fonds propres et s’installe à Microcity. Un prototype est alors développé en partenariat avec l’hôpital Bichât à Paris, spécialisé dans les apnées du sommeil et dans les essais cliniques. «Nous ne proposons pas de traitements, précise Philippe Koller. Notre appareil est utile pour le diagnostic et la prévention. L’idée est de cerner facilement et rapidement les véritables malades, sans les inconforts et complications imposés par le procédé actuel, fort coûteux et inefficace.» Le traitement de l’apnée, quant à lui, est largement couvert par le monde médical. 

En location auprès des pharmacies, le dispositif s’installe par-dessus un T-shirt et enregistre durant la nuit toute une série de paramètres (lire l’encadré). Au matin, le patient peut savoir directement, sur l’application ad hoc, si oui ou non il souffre d’apnée du sommeil. «Mais il ne peut pas avoir accès aux données, réservées au pharmacien ou au médecin à travers notre cloud», insiste le concepteur. Les cas légers peuvent ainsi être traités par l’apothicaire, les dossiers plus lourds renvoyés chez un spécialiste. 

Mais au-delà des soins, on l’aura compris, l’accumulation d’informations sur ce syndrome représente un nouveau marché en soi. «Situé en Suisse, notre serveur pourra stocker les big datas du monde entier», poursuit Philippe Koller. «C’est une mine d’or pour les centres de recherche.» Le business model prévoit ainsi un bénéfice sur la vente de l’appareil, une commission sur chaque location et la commercialisation des données anonymisées – un marché prudemment évalué à 50 millions de francs. En attendant, les deux ingénieurs ont déposé leur projet auprès d’InnoSuisse, l’agence fédérale pour l’encouragement à l’innovation, dans le but notamment de viser l’industrialisation. Quant à la certification CE pour les appareils de diagnostic, elle sera menée à l’hôpital Bichât. En Suisse, quelque 1500 pharmacies se sont déjà montrées intéressées par le concept.

 

Comme deux ceintures de cardio

Le dispositif se présente comme deux ceintures de cardio, utilisées en fitness. La première se place sur le thorax, la deuxième sur le diaphragme. Au nombre de cinq, les différents capteurs enregistrent les deux respirations, la position du dormeur, la fréquence cardiaque et l’oxygénation du sang. Cette dernière technologie a été développée par le CSEM. Les données sont ensuite transmises à un cloud via le smartphone de l’utilisateur.

Le dispositif respecte strictement les exigences de l’«American Academy of Sleep Medicine» (AASM) et ouvre la porte à son remboursement par la LAMal et les assurances maladie de l’Union européenne et de l’Amérique du nord.

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