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Un coup de poker socialiste avec des milliards pour enjeu

Le PS veut lier un crédit au Fonds monétaire international à une hausse de l'aide aux pays pauvres. Le Conseil national tranche aujourd'hui.

28 févr. 2011, 04:15

«Augmentez le budget de l'aide suisse au développement, et nous voterons le crédit de 12,5 milliards de francs en faveur du Fonds monétaire international.» C'est le marché que le Parti socialiste suisse propose aux autres formations politiques. Ce coup de poker sera-t-il gagnant? La réponse tombera en deux temps, aujourd'hui et demain à l'occasion de l'ouverture de la session de printemps du Conseil national.

La première manche se joue cet après-midi. La chambre du peuple débat d'une augmentation de l'aide au développement. Sous la pression du Parlement, le Conseil fédéral propose d'augmenter l'enveloppe allouée à la coopération suisse de 640 millions de francs pour les années 2011-2012, de manière à la faire passer de façon linéaire à 0,5% du revenu national brut (RNB) à l'horizon 2015. La gauche y est évidemment favorable, à l'unisson des œuvres d'entraide. «La Suisse est certes en retard sur les objectifs du Millénaire des Nations unies. Mais le passage à 0,5% du RNB constituerait un pas dans la bonne direction», salue ainsi Michèle Laubscher, d'Alliance Sud, qui regroupe six œuvres d'entraide suisses actives dans l'aide au développement.

Dans le camp bourgeois, une majorité du PDC devrait soutenir le projet, indique son président Christophe Darbellay. Les libéraux-radicaux sont plus sceptiques. Une partie de leurs élus au National se contentera de 0,45% du PNB, par respect du frein à l'endettement.

«A ne parler que de chiffres, on omet surtout un vrai débat sur l'efficacité de l'aide au développement, de même que sur la répartition entre aide bilatérale (réd: directement allouée aux pays choisis par la Direction du développement et de la coopération) et aide multilatérale», regrette Martine Brunschwig Graf (PLR/GE). Quant à l'UDC, elle rejette sans nuance la hausse des crédits.

Deuxième manche, demain matin: le National devra statuer sur un prêt extraordinaire de 12,5 milliards de francs en faveur du FMI, limité à deux ans. L'UDC y est clairement opposée. Pas question pour elle que la Suisse vienne en aide aux pays surendettés de la zone euro. «Si un Etat part en faillite, il faut le laisser aller! Cette aide sert juste à éviter que des banques allemandes et françaises ne perdent l'argent qu'elles ont prêté à ces pays européens en banqueroute», s'exclamait récemment Christoph Blocher. En face, le PDC soutiendra cette contribution extraordinaire. «Comme pays fortement exportateur et comme place bancaire importante, la Suisse a un intérêt à la stabilisation du système financier international», justifie son président Christophe Darbellay. «Voter ce crédit, c'est défendre les emplois en Suisse», ajoute Carlo Sommaruga (PS/GE).

Par ailleurs, «la Confédération ne fait qu'apporter sa garantie à un prêt avec intérêts octroyé par la Banque nationale suisse», ajoute la libérale-radicale Martine Brunschwig Graf. Le PLR conditionne toutefois son soutien au maintien de siège suisse au sein du conseil d'administration du FMI. Un siège aujourd'hui branlant: pour faire de la place aux puissances émergentes, le FMI veut en effet réduire le nombre de postes dévolus à l'Europe. Et les pays de l'UE menacés d'éjection lorgnent le strapontin helvétique. Un prêt au FMI contribuerait donc à raffermir la position de la Suisse.

«Mais ce siège ne vaut pas une contribution de 2200 francs par habitant, largement supérieure à celle d'autres pays!» tonne Christoph Blocher. Et le PS, comment se positionnera-t-il? Tout dépendra du sort réservé à l'aide au développement, laisse entendre Carlo Sommaruga. «Nous n'acceptons pas ce chantage socialiste», réagit Christophe Darbellay. Reste que si les partis du centre ne soutiennent pas l'aide au développement à 0,5% du RNB, la gauche pourrait faire «alliance contre nature» avec l'UDC et torpiller le crédit au FMI. Qui bluffe? Les cartes sont distribuées, la partie de poker peut commencer. Avec des milliards pour enjeu. /SGU

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