Le bâtonnier de l'ordre des avocats de Diyarbakir, Tahir Elçi, a été tué par balles samedi par des hommes armés non identifiés dans la grande ville à majorité kurde du sud-est de la Turquie, selon des sources hospitalières et sécuritaires. Deux policiers ont été tués et dix autres personnes blessées lors de cette fusillade aux circonstances encore confuses.
Selon les premiers témoignages, Tahir Elçi, 49 ans, venait de terminer une conférence de presse devant une mosquée dans le district de Sur lorsque des coups de feu ont retenti. Figure renommée de la cause kurde, il a été mortellement touché à la tête.
"Lors d'une déclaration à la presse de l'ordre des avocats de Diyarbakir, nos forces de sécurité ont été attaquées", a indiqué le bureau du gouverneur dans une déclaration. "Un policier a été tué et deux autres blessés. Pendant la fusillade qui a suivi, le bâtonnier de l'ordre des avocats de Diyarbakir Tahir Elçi a perdu la vie". Un deuxième policier, grièvement blessé, est décédé en soirée.
Selon des témoins, M. Elçi a été touché en plein visage lors de ces échanges, sans qu'il soit encore possible de déterminer avec certitude s'il a été spécifiquement visé par un des tireurs ou victime d'une balle perdue. Sur est régulièrement le théâtre d'affrontements entre la police et des jeunes combattants proches du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).
Erdogan "attristé" et conforté
Les autorités locales ont placé le district de Sur sous couvre-feu. Lors d'un discours prononcé à Burhaniye (ouest), le président turc Recep Tayyip Erdogan s'est déclaré "attristé par la mort d'Elçi". "Cet incident a démontré combien notre détermination à combattre le terrorisme est justifiée", a ajouté l'homme fort du pays.
"Nous continuerons ce combat jusqu'à son terme. Nous ne nous arrêterons pas, nous ne reculerons pas", a-t-il ajouté. L'agence de presse progouvernementale Anatolie a attribué l'attaque de Diyarbakir aux rebelles kurdes.
Inculpé d'apologie du terrorisme
Avocat connu et engagé de la cause kurde, Tahir Elçi faisait l'objet de poursuites pour avoir affirmé à la télévision mi-octobre que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui mène la rébellion kurde depuis 1984 en Turquie, "n'est pas une organisation terroriste".
Il avait été interpellé le 20 octobre dans son bureau de Diyarbakir, puis inculpé d'"apologie du terrorisme par voie de presse" par un tribunal d'Istanbul, avait d'être remis en liberté sous contrôle judiciaire. Selon les réquisitions du parquet, il risquait une peine d'un an et demi à sept ans et demi d'emprisonnement.
La mort de l'avocat intervient alors que les combats ont repris depuis l'été entre les forces de sécurité turques et les rebelles du PKK, après plus de deux ans de cessez-le-feu. Ces affrontements ont contraint les autorités à imposer des couvre-feu dans de nombreuses villes du sud-est du pays, où la police et l'armée livrent de violents combats contre de jeunes combattants armés proches du PKK qui se barricadent dans certains quartiers.