Votre publicité ici avec IMPACT_medias

Thaksin bientôt de retour à Bangkok?

05 juil. 2011, 09:13

C'est le bonneteau du jour: après l'écrasante victoire de sa sœur Yingluck aux élections législatives, quand l'ancien premier ministre Thaksin Shinawatra, renversé en 2006 par l'armée, reviendra-t-il en Thaïlande? A Bangkok, tout le monde y joue.

Sunai Phasuk, chercheur pour une organisation de défense des droits de l'homme, se livre au petit exercice de calcul mental: «Fin juillet, la formation du gouvernement… Deux mois pour faire adopter la loi d'amnistie… Si le texte est prêt, Thaksin peut être de retour dès octobre.»

Pas d'émeutes

Quand Thaksin déclare depuis Dubaï, où il s'est exilé pour échapper à une peine de prison de deux ans pour corruption, que «la priorité est à la réconciliation» et qu'il veut prendre sa retraite, personne ne le croit. Les campagnes déshéritées du Nord et du Nord-Est qui attendent le retour de leur sauveur après avoir tant sangloté quand il confiait, dans des CD distribués sous le manteau, qu'il était «si malheureux en exil», n'ont d'ailleurs retenu de son discours qu'une seule chose: il n'exclut pas de rentrer prochainement.

Thaksin a maigri, vieilli, mais il reste un animal politique redoutable. Alors que la Thaïlande spéculait sur de rudes lendemains électoraux, il n'y a eu ni émeutes urbaines ni bruits de bottes, car «Thaksin avait engagé des pourparlers secrets avec le palais et l'armée», croit savoir Shawn Crispin, fin connaisseur des intrigues du monde politique thaïlandais.

Au fil de ces mystérieuses réunions avec une dame de compagnie de la reine Sirikit et le ministre de la Défense, Prawit Wongsuwan, Wattana Muangsook, homme de confiance de Thaksin, aurait obtenu de l'armée qu'elle ne s'oppose pas à la formation d'un gouvernement Pheu Thai. «En contrepartie», dit Shawn Crispin, «le clan Thaksin s'est engagé à ne pas lancer de procédures judiciaires contre les officiers qui ont ordonné le coup d'Etat de 2006 et la répression des manifestations des chemises rouges (qui ont fait 91 morts l'an dernier). Mais aussi à ne pas interférer dans les affaires militaires et notamment dans le remaniement annuel à la tête de l'armée.» Enfin, il a dû sacrifier les éléments antimonarchistes du front uni pour la démocratie et contre la dictature, la formation des rouges et arrêter toute critique contre Prem Tinsulanonda, éminence grise du palais qui avait cristallisé la colère des chemises rouges.

«La Thaïlande, c'est Byzance, ses complots, ses rumeurs, ses chausse-trappes», résume le chercheur Sunai Phasuk. «Les amitiés ne sont pas éternelles, les inimitiés et les pactes n'ont plus.» Si l'accord négocié en coulisses présage une transition démocratique en douceur et un nouvel espoir de réconciliation nationale, il est éminemment fragile, surtout en ces temps d'interrogations autour de la succession du roi Bhumibol Adulyadej, âgé et hospitalisé depuis près de deux ans.

La résistance de Thaksin est remarquable. «Personne n'avait jamais dominé le paysage politique thaïlandais comme Thaksin», estime l'analyste politique thaïlandais Thitinan Pongsudhirak. Si on voit mal comment sa sœur cadette pourrait prendre ses distances avec un homme à la personnalité si écrasante, les chemises rouges, elles, pourraient se sentir flouées par une réconciliation qui se limiterait à Thaksin et aux élites du pays.

Votre publicité ici avec IMPACT_medias