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Sarkozy et Fillon misent sur la rigueur

08 nov. 2011, 11:06

La précampagne présidentielle française a désormais un visage, et il est sombre: celui de François Fillon, costume noir et cravate du même ton, mine grave, annonçant hier aux Français le deuxième plan d'austérité en trois mois. «Je dis aux Français que l'effort budgétaire et financier d'aujourd'hui est un choix que nous faisons pour la nation et pour les générations à venir», a solennellement lancé le premier ministre, depuis Matignon. «Depuis 2007, nous vivons une phase de basculement de l'histoire économique du monde. (…) Notre pays doit retrousser les manches.»

Le chef du gouvernement, qui n'avait pas hésité à employer les mots de «faillite» en 2007 et de «rigueur» en 2010, peut se targuer d'avoir tiré le premier la sonnette d'alarme sur l'état des finances publiques: «Le mot faillite n'est plus un mot abstrait», a-t-il fait valoir hier. Mais Fillon n'en est pas moins conscient du risque qui consiste à mener une politique d'austérité à six mois seulement de la présidentielle. «La situation est très difficile, nos choix aussi», reconnaît un ministre. «C'est une question que nous ne nous posons pas», a botté en touche Fillon hier. «Les Français nous ont confié une mission, un devoir: sortir notre pays de cette crise. Ni la main du président, ni celle du gouvernement ne tremblent sur cette affaire.»

Situation inédite

L'exécutif ne s'en trouve pas moins dans une situation inédite: aucun gouvernement n'a mené pareille politique d'austérité aussi près d'une présidentielle. «Raymond Barre n'avait cessé de prêcher la rigueur mais Valérie Giscard d'Estaing, qui redoutait de perdre la présidentielle, avait exigé de lui un peu de mou», rappelle le politologue Roland Cayrol. Une prudence qui fait sourire à Matignon: «Giscard n'a pas été au bout et ça ne l'a pas empêché de perdre en 1981!»

Pour Jérôme Sainte-Marie, de l'institut CSA, la situation à laquelle sont confrontés Nicolas Sarkozy et François Fillon est «totalement nouvelle»: «A droite ou à gauche, on va assister à une campagne sans promesse», constate le spécialiste des sondages, qui note toutefois que Sarkozy part en campagne avec «tous les handicaps possibles, depuis la hausse de la fiscalité jusqu'à la hausse du chômage».

Conscient du danger, François Fillon s'est employé hier à démontrer que les choix du gouvernement étaient les seuls à même de «protéger les Français». Il a également tenté de désamorcer les critiques de l'opposition sur les «reniements» de 2007: «Ce que nous entreprenons n'est pas une rupture, comme celle que la France a connue en 1983, passant d'une politique laxiste à une politique d'austérité», a-t-il plaidé, en insistant sur le fait que la restauration restait à un «taux réduit» (même revalorisé à 7%) et que les heures supplémentaires défiscalisées n'étaient pas remises en cause.

«Protéger l'avenir»

En annonçant les mauvaises nouvelles, Fillon prépare le terrain à Sarkozy, qui veut faire de sa capacité à prendre les décisions «courageuses» un argument pour 2012. Devant des étudiants, aujourd'hui à Strasbourg, le chef de l'Etat insistera sur «la nécessité de protéger l'avenir». «La présidentielle se jouera là-dessus», assure un conseiller élyséen. «Il y aura le camp des réformateurs contre celui des conservateurs.» A l'Elysée, on veut se persuader que si les discours de rigueur n'ont jamais payé sous la Ve République, les temps et l'opinion «ont changé». «Les gens sont responsables», note un conseiller. «Le pire aurait été de ne rien faire. François Hollande est aphone! Il n'a pas de contre-propositions.» Ce conseiller veut croire que cette crise «assainira la campagne de toute dérive démagogique».

Bond dans les sondages

A l'Elysée, le dernier sondage LH2 pour «Le Nouvel Observateur», qui voit la cote de popularité du président bondir de cinq points (pour s'établir à 37% d'opinions positives), est vu comme le signe que la stratégie est payante. «Pour la première fois, les gens ne veulent plus rêver mais exigent des décisions raisonnables», assure Roland Cayrol. «Beaucoup ont fait trop vite l'hypothèse que la présidentielle était jouée. Or, les jeux sont loin d'être faits.»

Le ministre du Travail Xavier Bertrand ne dit pas autre chose: «Les Français préfèrent qu'on leur demande des efforts plutôt que de ne rien faire. Cette crise n'est pas normale. Cette présidentielle ne sera pas non plus une élection normale.»

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