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Les Syriens n'y croient plus

21 juin 2011, 11:04

Il a donc fini par parler. Dans cet amphithéâtre de l'université de Damas, tous les ingrédients avaient été rassemblés pour galvaniser les foules. Une salle comble, des salves d'applaudissements et, à l'appui, de nouvelles promesses: un «dialogue national», d'abord, et l'examen de réformes politiques, dont la fin du monopole du parti Baas au pouvoir.

Pourtant, dans son discours de 70 minutes retransmis en direct à la télévision - le troisième en trois mois de crise sans précédent, Bachar el-Assad a échoué à apaiser la colère de l'opposition. Pire. A peine avait-il fini de s'exprimer que, d'après plusieurs témoins contactés par «Le Figaro», les rues de Homs, Hama, Baniyas ou encore Deir ez-Zor étaient prises d'assaut par des dizaines de protestataires. «Le peuple réclame la fin du régime», ont scandé, à Homs, les manifestants. Une vidéo de leur minirassemblement a immédiatement été postée sur YouTube.

Railleries contre le raïs

Dans la foule, composée d'hommes, de femmes et d'enfants, une pancarte ose même railler le raïs de Damas. «La compagnie pharmaceutique de Homs connaît le meilleur médicament pour faire vomir: écouter le discours de Bachar el-Assad», peut-on y lire en lettres arabes. «Nous allons poursuivre notre révolte», prévient Adel al-Othman, un des porte-parole des «Comités locaux de coordination», une association indépendante qui chapeaute les manifestations à travers le pays.

Contacté par téléphone dans sa ville natale de Deir ez-Zor, il estime que le message de Bachar el-Assad ne fait que «renforcer la crise». «Cela fait 40 ans qu'on nous assène les mêmes discours. Avec Hafez el-Assad, c'était la même chose. Bachar, comme son père, enferme ses opposants, tue sa population. Alors, comment croire à ses promesses?», s'interroge-t-il. Pour lui, «ce régime n'est pas réformable. Il doit tomber, un point c'est tout».

Revendications légitimes

Dans son discours, prononcé au lendemain de l'annonce, par un groupe d'opposants, de la création d'un «Conseil national pour mener la révolution», Bachar el-Assad a reconnu l'existence de «manifestants qui ont des revendications légitimes». Il a également fait référence au besoin d'équité sociale et aux problèmes de corruption. Mais il n'a répondu, en retour, à aucune des revendications concrètes de la population - qui réclame notamment le retrait de l'armée des villes et le respect du droit pacifique à manifester.

«Point de non-retour»

«Les Syriens ne veulent pas de demi-mesures», prévient, depuis Bruxelles, Georges Chachan, le cofondateur de la Déclaration de Damas, un collectif d'opposants créé en 2005. «Une fois de plus, Bachar el-Assad s'est enfermé dans la théorie du complot étranger. Il a également parlé d'une solution militaire et sécuritaire. Or c'est tout le contraire que souhaitent les Syriens», précise Georges Chachan. Quant à l'offre de dialogue national, ce dissident n'y voit que de la poudre aux yeux. «Un dialogue? Quel dialogue? A partir du moment où le régime choisit ses interlocuteurs, qu'il décide du calendrier des discussions et des réformes à lancer, bref, qu'il décide de tout, j'appelle ça un monologue!», s'emporte-t-il.

Les capitales occidentales ont, de leur côté, réagi avec fermeté au discours du dirigeant syrien. Pour Alain Juppé, Bachar el-Assad a atteint «un point de non-retour». «La répression a fait plus d'un millier de morts (...), elle a été d'une violence inouïe, on ne peut pas l'accepter sans réagir», a souligné le ministre français des Affaires étrangères à l'issue d'une réunion à Luxembourg avec ses homologues européens.

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