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Photojournalisme: le "visage de la haine" primé par le World Press Photo

Lorsque Burhan Ozbilici assiste en direct au meurtre de l'ambassadeur russe en Turquie, il ne prend pas la fuite. Rattrapé par son devoir de journaliste, le photographe immortalise l'expression rageuse du meurtrier. Son cliché a été primé photographie de l'année par le World Press Photo.

13 févr. 2017, 12:44
/ Màj. le 13 févr. 2017 à 13:04
Burhan Ozbilici a pris cette photo au péril de sa vie.

Doigt en l'air, une arme à la main, le visage marqué par la colère: l'image de l'assassin de l'ambassadeur russe en Turquie a remporté lundi le premier prix du World Press Photo. Le cliché est dû au Turc Burhan Ozbilici, photographe de l'agence Associated Press (AP).

Les juges du plus prestigieux concours de photojournalisme ont salué le courage de Burhan Ozbilici, qui a pris la photo le 19 décembre alors qu'un policier de 22 ans tirait neuf balles sur l'ambassadeur russe Andreï Karlov. Le tireur avait ensuite été lui-même abattu, après avoir lancé "Allah Akbar" et affirmé vouloir venger Alep.

Vue 18 millions de fois dans les heures qui ont suivi l'assassinat, cette image "a marqué un moment important dans l'histoire de la Turquie", a déclaré à l'AFP Burhan Ozbilici, soulignant qu'il "devait faire son travail": "en tant que journaliste, je ne pouvais pas partir pour sauver ma peau".

 

 

"Le visage de la haine"

Arrivé en retard ce jour-là à l'inauguration de cette exposition d'art, Burhan Ozbilici raconte avoir tout de suite saisi la gravité de la situation en entendant les tirs. Il s'est dit désolé pour la mort de l'ambassadeur, "un homme digne, sincère mais tué comme un résultat de la catastrophe syrienne".

Lui qui a couvert le coup d'Etat avorté en Turquie et mené des missions en Syrie, en Libye ou en Egypte dit avoir toujours essayé d'être prêt pour des moments difficiles et d'avoir le "courage, vis-à-vis d'un monde pourri par les malhonnêtes, par les corrompus, faire quelque chose de bien".

Pour Joao Silva, photographe du New York Times également membre du jury, cette image d'un homme qui "avait clairement atteint un point de rupture" représente tout ce qu'il se passe à travers le monde aujourd'hui. "C'est le visage de la haine".

Plus de 80'000 images en lice

Plus de 5000 photographes issus de 125 pays ont soumis quelque 80'000 images au jury. Parmi eux, 45 ont été récompensés dans huit catégories différentes.

"C'était une décision très, très difficile, mais à la fin, nous avions le sentiment que l'image de l'année était une image explosive qui témoignait vraiment de la haine de notre époque", a commenté Mary F. Calvert, membre du jury, citée dans un communiqué.

Trois photographes de l'Agence France-Presse ont été récompensés pour leur travail. Basé aux Philippines, Noel Celis monte sur la troisième place du podium dans la catégorie "General News" (informations générales) pour une image prise dans une prison construite pour accueillir 800 détenus mais qui en héberge près de 4000. On y voit des hommes entassés, torse nu, visage marqué, tentant de dormir sur les marches d'une cage d'escalier en béton.

 

 

Hommage aux photographes syriens

Les images de l'AFP prises en Syrie ont également été récompensées par les deuxième prix des catégories "Spot News, Singles" (Informations brûlantes, image seule) et "Spot News, Stories" (reportages). L'image d'Abd Doumany montre deux petites filles, le visage couvert de poussière et de sang, soignées par un infirmier. Des enfants vivant l'horreur de la guerre et secourus des décombres d'Alep sont également au coeur dans la série d'Ameer Alhalbi.

 

 

Stuart Franklin, président du jury final de neuf personnes, a salué le courage de ces jeunes journalistes syriens "prenant des risques terribles (et) racontant leur histoire depuis l'enfer".

En collaboration avec l'agence Keystone, le Musée national suisse présentera les photos récompensées lors d'une exposition prévue du 10 mai au 11 juin à Zurich.

 
 
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