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Le point de non-retour est franchi

La dictature a clairement choisi la voie de la répression tous azimuts malgré les promesses de réforme faites par el-Assad.

27 avr. 2011, 16:21

Malgré la promesse de réforme faite solennellement à son peuple, deux fois au cours du dernier mois, par le président, Bachar el-Assad, la dictature syrienne a clairement choisi la voie de la répression tous azimuts. Trois morts, cela s'appelle une bavure; 30 morts, c'est un grave dérapage sécuritaire; mais 300 morts, c'est le début d'une guerre sans merci du régime contre une population aspirant, comme partout dans le monde arabe, à l'établissement d'un Etat de droit démocratique.

Refaire le coup de 1982

Le propre des dictatures militaires, c'est de ne jamais rien apprendre des mouvements populaires et de toujours recourir aux vieilles recettes sécuritaires. En lâchant sur la ville de Deraa les blindés et les forces spéciales dirigées par Maher (le jeune frère de Bachar), en coupant toutes les routes menant à cette cité rurale de 85 000 habitants située non loin de la frontière jordanienne, le régime cherche à refaire le coup qui lui avait si bien réussi à Hama en 1982 (où le centre historique de la ville avait été littéralement rasé).

Mais il y a ici deux différences de taille. Premièrement, l'insurrection de Hama était une rébellion armée et violente de Frères musulmans ayant pris le contrôle de la ville, alors que les manifestations pacifiques de Deraa n'avaient pour but que de faire libérer des adolescents arrêtés et placés au secret à Damas, après qu'ils eurent commis le «crime» d'écrire un graffiti réclamant un changement de régime. En 1982, peu de Syriens se sentaient solidaires des insurgés de Hama, alors que de nombreuses villes de province ont marqué récemment dans la rue leur solidarité avec les manifestants de Deraa. Deuxième différence, à cause de Twitter et de YouTube, le territoire syrien et l'étranger sont aujourd'hui alimentés en temps réel de nouvelles de la répression, alors que l'affaire de Hama n'avait été connue que plusieurs semaines plus tard.

Maintenant qu'un point de non-retour a été franchi dans la répression par une dictature alaouite s'estimant le dos au mur, la jeunesse syrienne va-t-elle retourner à la peur et au silence? Les conscrits de l'armée continueront-ils à obéir à leurs officiers? Les unités régulières suivront-elles jusqu'au bout les unités d'élite principalement alaouites? Peut-on boucler militairement dix villes à la fois? Les tribus sunnites voisines, au nord du Liban, en Jordanie, à l'ouest de l'Irak, laisseront-elles écraser leurs cousins syriens sans réagir?

Rien n'est moins sûr. A moyen terme, on est en droit d'être inquiet pour l'avenir de la minorité alaouite (dissidence du chiisme, moins de 10% de la population, ayant progressivement confisqué le pouvoir après le coup d'Etat du général Hafez el-Assad en 1970), dont les dirigeants sont honnis par la population. Le sang qui a coulé en Syrie va susciter la vengeance des tribus auxquelles appartiennent les victimes, sans qu'on puisse hélas prévoir quand s'arrêtera cette spirale de violence.

Pas d'éventuelles pressions militaires

Les protestations et les éventuelles sanctions commerciales en provenance de l'Occident ont peu de chance d'avoir un quelconque effet sur un régime qui a maintenu contre vents et marées son alliance stratégique avec l'Iran des mollahs. Quant aux éventuelles pressions militaires, il n'y en aura pas. C'est déjà par «miracle» que la Ligue arabe et le Conseil de sécurité des Nations unies ont donné, du bout des lèvres, leur blanc-seing à une intervention occidentale en Libye. Cette dernière n'étant pas concluante pour le moment, on ne voit pas l'opération se reproduire en Syrie à brève échéance. Le cauchemar irakien est encore dans toutes les mémoires, y compris et surtout à Washington.

Il ne reste plus qu'à espérer que ce beau pays, paradis touristique sous-exploité, où la population a toujours accueilli les étrangers avec chaleur, Etat non confessionnel ayant su garder sa minorité chrétienne ancestrale, ne sombre pas dans une guerre civile générale sunnites-alaouites, qui ferait exploser à jamais toute idée d'unité nationale syrienne.

 

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