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La journée d'un condamné à mort

20 sept. 2011, 11:12

La Commission des gr?ces de l'Etat de G?orgie doit d?cider si elle accepte de commuer la peine de Troy Davis en r?clusion ? perp?tuit? ou si cet homme aux fines lunettes cercl?es et aux yeux songeurs, dont l'histoire ?meut l'opinion am?ricaine et internationale depuis des ann?es, sera finalement ex?cut? comme pr?vu par injection mortelle demain ? 19 heures. Par trois fois d?j?, en juillet 2007, septembre puis octobre 2008, Troy Davis a d? dire au revoir ? ses proches et faire face aux mille et un d?tails qui pr?c?dent une ex?cution.

On lui a expliqu? froidement comment il mourrait, en lui conseillant de ne pas opposer de r?sistance. On lui a demand? ce qu'il souhaitait que la prison fasse de son corps. En septembre 2008, il a appris la suspension de sa sentence seulement deux heures avant l'horaire de l'ex?cution. ?Ce qu'il a endur? est inimaginable!?, dit Marlene Martin, de Campagne pour abolir la peine de mort, ?voquant un homme ?courageux et tr?s croyant?.

Aucune preuve

Dans une lettre qu'elle a post?e sur son site, Troy Davis lui a demand? de ?continuer ? se battre?. Apr?s la marche ? laquelle elle a particip? ? Atlanta le week-end dernier, Marlene se disait hier ?tr?s confiante?. ?Le soutien de l'opinion a provoqu? un s?isme. Si la commission ignore ce mouvement et ex?cute Troy, cela provoquera un scandale mondial!?

La pression est en effet ?norme sur les cinq membres de la commission, ultime instance d'appel apr?s des ann?es de rebondissements juridiques. Car le cas de Troy Davis, condamn? pour le meurtre du policier Mark MacPhail en 1989, frappe par la montagne de doutes qui p?sent sur sa culpabilit?. Aucune preuve physique n'a jamais ?t? produite, pas plus que l'arme du crime. Sept des neuf t?moins qui avaient affirm? l'avoir vu assassiner l'officier de police se sont depuis r?cus?s, dressant un tableau stup?fiant de leurs mensonges et des pressions exerc?es sur eux par les enqu?teurs.

Sur les deux t?moins restants, l'un avait initialement affirm? ne pas ?tre en mesure d'identifier qui que ce soit. Quant au t?moin central, un certain Sylvester Coles, le premier ? se rendre au commissariat au lendemain du meurtre pour d?signer Troy Davis, il appara?t comme un suspect alternatif potentiel, pour s'?tre vant?, selon plusieurs t?moins, d'?tre le vrai assassin du policier tu?. Ces t?moins doivent ?tre entendus par la Commission des gr?ces.

Pr?jug?s raciaux

Le 19 ao?t 1989, vers 1h du matin, l'officier de police Mark MacPhail, un p?re de famille de 27 ans, tente de venir au secours d'un clochard battu ? coups de crosse de pistolet quand lui-m?me est abattu ? bout portant. Pour l'accusation, c'est Davis qui a fait le coup apr?s avoir rudoy? le clochard. Il sera arr?t? d?s le lendemain, puis condamn? ? mort en 1991, lors d'un proc?s o? il niera farouchement sa culpabilit?.

C'?tait il y a vingt ans et Troy, Afro-Am?ricain des quartiers pauvres de Savannah, aurait pu rester dans l'anonymat de sa prison du Sud profond, o? tant de condamn?s, n'ayant ni les moyens financiers, ni l'?ducation, ni l'?nergie n?cessaires pour se battre, attendent leur derni?re heure sans broncher. ?La G?orgie ne l?sine pas avec la peine de mort, surtout quand il s'agit de punir le meurtre d'un policier blanc, les pr?jug?s raciaux restent tr?s forts?, note Mark Clements, un ex-d?tenu, qui a pass? 28 ans en prison pour un crime qu'il n'avait pas commis. Mais dans son malheur, Troy Davis, qui a grandi aupr?s de sa m?re divorc?e, a un atout ma?tre: son a?n?e, Martina, une boule d'?nergie, qui remue ciel et terre pour le d?fendre, malgr? le grave cancer qui la ronge. Pendant des ann?es, cela ne donne pas grand-chose. Puis, en 2007, la jeune femme croise le chemin d'Amnesty International, qui se penche sur le dossier juridique et ?en d?couvre avec stup?faction les graves lacunes?, raconte Laura Moye, responsable du dossier Peine de mort au sein de l'ONG.

D?s lors, l'affaire Troy Davis passe dans la lumi?re. Quelque 51 membres du Congr?s vont s'?mouvoir. Du pape Beno?t XVI ? l'ancien pr?sident Jimmy Carter, nombre de personnalit?s r?clament une gr?ce, estimant que ?risquer d'ex?cuter un innocent serait une grave erreur judiciaire?. ?Dans le cas Davis, il y a trop de doutes pour risquer une ex?cution?, r?sume l'ancien patron du FBI William Sessions, pourtant favorable ? la peine de mort.

?Le monde entier regarde?

Une p?tition rassemblant 663 000 signatures a ?t? envoy?e par Amnesty. ?L'affaire est embl?matique des ?checs de notre syst?me judiciaire. D?cider d'ex?cuter Troy Davis alors que les chefs d'accusation sont en train de s'effondrer serait inacceptable? A Amnesty, nous ne prenons pas position pour savoir s'il est innocent ou non, mais nous disons qu'en l'absence de preuves de sa culpabilit?, il serait contraire aux droits de l'homme de risquer d'ex?cuter un innocent?, confirme Laura Moye.

?Le monde entier regarde Savannah?, souligne-t-elle. Moye affirme comprendre que la m?re du policier MacPhail, persuad?e de la culpabilit? de Troy Davis, souhaite que justice soit faite. ?Mais tuer un innocent ne serait pas faire justice.? La militante du Centre de lutte contre la peine de mort, Marlene Martin, juge insupportable l'id?e que la loi g?orgienne ne permette pas un nouveau proc?s, en cas de gr?ce. ?Pourquoi Troy devrait-il rester en prison ? perp?tuit? s'il est innocent? Le fond du probl?me est que notre syst?me judiciaire et policier refuse de reconna?tre ses erreurs.?

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