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L'ouest de la Libye négligé par la coalition internationale

Les opérations de la coalition internationale ont évité jusqu'à hier l'ouest de la Libye, un oubli en contradiction avec la résolution de l'ONU, selon Pascal de Crousaz. Cet expert du Moyen-Orient met en cause les tensions diplomatiques, ainsi que les moyens militaires de la coalition, qui ne sont pas illimités.

24 mars 2011, 12:13

«Les civils de l'ouest de la Libye ont été abandonnés» par la coalition, s'exclame Pascal de Crousaz, expert du Moyen-Orient. Cette dernière a attendu hier pour lancer une opération à Misrata.

Le peu d'attention porté par les forces occidentales à l'Ouest du pays, où les civils des villes de Misrata et de Zentane se font bombarder depuis plusieurs jours, «est en porte-à-faux avec la résolution de l'ONU qui vise à protéger tous les civils», a-t-il confié. Le doctorant en relations internationales à l'Institut des Hautes études internationales et du développement (IHEID) à Genève impute en partie cette immobilité à une «volonté délibérée de ne pas conférer à l'opération un caractère massif et spectaculaire qui aggraverait les frictions diplomatiques. Certains veulent se contenter du strict minimum», relève-t-il, et «font preuve de peu de motivation et d'engagement».

Selon lui, ces hésitations diplomatiques et ces tensions au sein de la coalition ont des conséquences directes sur le terrain et peuvent expliquer la non intervention dans l'Ouest du pays jusqu'à hier. Cette mise à l'écart de la région peut aussi s'expliquer par des réticences émises par les généraux. Selon Pascal de Crousaz, des responsables militaires affirment que les moyens militaires alloués en Libye «dégarnissent d'autres terrains d'opérations comme l'Afghanistan». La crise économique, dont se relèvent encore certains pays européens, est également un facteur à prendre en compte.

Avec des moyens militaires non illimités, la coalition se verrait obligée de mener une opération divisée en plusieurs phases, où l'on pare au plus pressé avant de se tourner vers d'autres objectifs. Si la coalition suit cette logique, Pascal de Crousaz espère que l'intervention sur Misrata est «le début d'une série» et non une intervention isolée.

Directeur du Centre d'études et de recherche sur le monde arabe et musulman (Cermam) à Genève, Hasni Abidi attribue pour sa part cette indifférence de la coalition pour l'Ouest à la volonté d'éviter des bavures militaires et des dommages collatéraux. La stratégie d'«imbrication» menée par Mouammar Kadhafi vise à «occuper le plus possible les villes afin de brouiller les pistes pour les alliés occidentaux» et de poser problème à la coalition, relève-t-il.

A Benghazi, le fief des rebelles dans l'est de la Libye, les troupes pro-Kadhafi sont parvenues jusqu'aux faubourgs de la ville, sans y pénétrer, et étaient clairement discernables des populations civiles. A l'Ouest, au contraire, «les forces pro-Kadhafi sont à l'intérieur des villes», souligne Hasni Abidi. Pascal de Crousaz acquiesce quant il s'agit de Misrata, où «Kadhafi mène une tactique d'imbrication». Mais cet argument ne tient pas selon lui à Zentane. La ville se situe sur un plateau rocheux, entouré de plaines désertiques. La cinquantaine de blindés qui l'assiège en plein désert et la pilonnent «serait une cible de choix pour l'aviation», estime l'expert.

Outre la protection des populations civiles, une intervention à l'Ouest du pays permettrait de garder «des avant-postes des insurgés, non loin de la capitale», ce qui est «indispensable» sinon Kadhafi pourrait mettre en place un «réduit tripolitain quasi inexpugnable». /DGE-ats

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