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L'Iran étend son emprise sur l'Irak

11 juil. 2011, 10:28

A quelques mois de la fin du retrait des troupes américaines d'Irak, le bilan de l'opération «Iraqi Freedom», lancée en 2003 par l'Administration Bush, est loin de correspondre aux aspirations de Washington. «À des années-lumière, même!», s'exclame le représentant d'un pays allié des États-Unis en poste à Bagdad. Le phénomène qui complique singulièrement l'équation des États-Unis était sous-jacent depuis plusieurs années; il est aujourd'hui patent et s'expose à la vue de tous: le rôle joué par l'Iran voisin inquiète la communauté internationale et un nombre croissant d'Irakiens.

«Vous ne pouvez pas imaginer les dégâts causés par Téhéran dans ce pays», soupire ce diplomate occidental. Véritable bête noire de l'ancien président irakien Saddam Hussein, exécuté par pendaison en 2006, le puissant voisin perse jouit aujourd'hui en Irak d'une aura qui est en train de devenir la principale préoccupation des Arabes sunnites, ainsi que des Occidentaux. À l'emprise économique et politique amorcée par l'arrivée des chiites au pouvoir à Bagdad en 2006, s'ajoute désormais celle d'un islam «à l'iranienne» qui gagne du terrain. Cette situation provoque de vives tensions avec les milieux laïcs et les minorités religieuses irakiennes, qui accusent le gouvernement d'ouvrir la voie à la charia, la loi islamique.

Une influence qui n'épargne aucun domaine

Terre sainte du chiisme par excellence, l'Irak suscite toutes les convoitises de la République islamique iranienne. Les investissements visant l'augmentation du tourisme religieux se multiplient: construction d'un aéroport à Nadjaf, projets d'hôpitaux à Karbala et Nadjaf, accords bilatéraux facilitant le voyage des pèlerins, support logistique et médical pendant les périodes de pèlerinage… «Les chiites d'Irak ne disposaient pas d'une véritable liberté de culte sous l'ancien régime. Aujourd'hui, l'arrivée massive des pèlerins iraniens a eu pour effet de renforcer ce sentiment de liberté et d'appartenance. Le communautarisme religieux prime sur le sentiment nationaliste», analyse un député sunnite qui s'exprime sous couvert d'anonymat. «Par conséquent ces personnes se sentiront plus proches d'un Iranien chiite que d'un Irakien sunnite», résume-t-il.

Une influence qui ne semble épargner aucun domaine, particulièrement celui de la culture. «Les pays voisins de l'Irak sont naturellement plus présents à Bagdad, mais ensuite, à chacun sa stratégie. La Turquie par exemple investit davantage dans le commerce et l'énergie, car l'Irak représente pour elle un marché juteux, alors que l'Iran préfère miser sur l'éducation», explique Mudhafer Ubaid al-Rubai, chargé des relations internationales au ministère de la Culture à Bagdad. Dans un Irak en pleine reconstruction, où l'accès aux services publics de base comme l'eau et l'électricité peine toujours à être rétabli, Téhéran anticipe en promettant la rénovation de tous les cinémas et théâtres de Bagdad. En contrepartie, un accord signé entre les autorités irakiennes et le Ministère de la culture et de l'orientation islamique iranien prévoit l'organisation annuelle d'un festival de films consacrés à l'imam Hussein, petit-fils du prophète Mahomet, considéré comme l'une des principales figures du chiisme.

La coopération entre les deux gouvernements chiites inquiète également les milieux de l'enseignement.

Mixité des cours

En décembre, la proposition de l'ancien ministre de l'éducation, Khudhair al-Khuzay avait suscité l'indignation des défenseurs de la laïcité. Celui-ci prévoyait notamment la suppression de la mixité et des cours de musique dans les universités, considérés comme contraires aux valeurs de l'islam. Propositions immédiatement retirées face à la pression d'une partie de la rue. Pour Adel al-Kayar, professeur en sciences politiques, «le premier ministre Nouri al-Maliki est aujourd'hui obligé de négocier et de faire des concessions avec des partis politiques chiites proches de l'Iran. C'est un véritable numéro d'équilibriste».

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