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L'autre grand coup de balai

14 sept. 2011, 10:35

Des femmes de ménage, des fonctionnaires ou des femmes d'affaires se donnent rendez-vous tous les jours à Tripoli pour balayer les rues ou peindre des fresques sur les murs de la capitale libyenne. Elles se retrouvent Place Al-Qadissiah armées de balais ou de pots de peinture avant de se répandre dans la ville. «On a commencé notre campagne samedi et on va la mener pendant une semaine», indique Nemaa Aribi, 52 ans, en ramassant les ordures Rue du Chatt.

Le même poids qu'un fusil

«Je viens avec ma famille participer à la révolution. Si j'avais pu prendre une arme, je l'aurais fait, mais le balai a pour moi le même poids», dit cette enseignante en ajustant son voile. Tripoli s'est couverte d'ordures après l'entrée des combattants anti-Kadhafi dans la ville le 20 août et la chute de sa forteresse de Bab al-Aziziya, trois jours plus tard.

Après l'Aïd el-Fitr, la fête marquant la fin du ramadan, il y a deux semaines, une partie des éboueurs ont repris le travail. Mais comme il s'agit pour la plupart d'immigrés dont une partie a fui le conflit, la ville n'a pas été débarrassée totalement de ses déchets.

«C'est un nouveau départ car nous sentons maintenant que ce pays est le nôtre», dit Mme Aribi à propos de l'initiative de ces femmes. Elle montre un hôtel habité par les journalistes étrangers en déclarant: «Nous voulons montrer au monde que nous sommes un peuple civilisé qui aime la propreté et est fier de son pays.».

L'une de ses poches, Marwa Aribi, 19 ans, s'échine contre les bouteilles en plastique en se faisant féliciter par les automobilistes qui passent. «Nous devons donner quelque chose à ce pays. Avant la révolution, on n'avait aucun patriotisme, mais on ressent maintenant une responsabilité envers notre cité», souligne cette étudiante dans une école d'ingénieurs. «Les journalistes doivent voir un beau visage de Tripoli et nous aussi.» Selon elle, «les femmes de Tripoli n'auront plus peur de rien à l'avenir et vont crier fort pour défendre leurs droits et leur pays.»

Un autre membre de la famille, Tahar Aribi, 55 ans, dirige des jeunes en leur expliquant comment ramasser les ordures et les entasser dans des bennes. Ce pilote de la compagnie nationale Libyan Airlines explique que les habitants de Tripoli sont devenus «plus amicaux depuis la libération» et que «l'avenir de la Libye se lit dans le regard des jeunes.» La participation de sa femme, de ses filles et de ses proches à la campagne symbolise «la liberté retrouvée de la femme qui lève désormais haut la tête dans un pays qui n'est plus celui d'un seul homme», dit-il, en référence au régime déchu dans lequel Mouammar Kadhafi réglait seul le sort des Libyens.

D'autres femmes ont choisi d'embellir les murs de la capitale qui n'ont porté pendant quatre décennies que les slogans de propagande du régime Kadhafi.

Un air de liberté

Rana Tikli, 18 ans, peint près de Bab al-Aziziya. Hissée avec d'autres sur un échafaudage, elle trace les couleurs de la révolution, noir, vert, rouge et blanc et dessine des caricatures du leader déchu en fuite. «Je vais peindre le drapeau libyen traversant une tête de Kadhafi. Nous voulons dire qu'on a tué Kadhafi, du moins psychologiquement», lance-t-elle en regardant une fresque montrant l'ancien dirigeant jeté par une femme dans une «poubelle de l'histoire» pleine de dirigeants nazis, de rats et de copies de son Livre vert. «Nous respirons un air de liberté», dit sa petite sœur Camilla.

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