Votre publicité ici avec IMPACT_medias

Benoît XVI cherche à se réconcilier

23 sept. 2011, 11:17

Malgré les turbulences des derniers mètres, le pilote de l'Airbus d'Alitalia transportant hier matin Benoît XVI vers son pays natal a réussi un atterrissage en douceur sur le sol de Berlin. Et le pape, désormais seul vrai pilote de son troisième voyage en Allemagne - préparé avec un soin méticuleux par ses équipes et par lui-même -, a, semble-t-il, tenté la même opération, réussir son arrivée. En sachant qu'il se posait sur un terrain hostile.

Dans l'avion, face aux journalistes, il avait d'ailleurs dessiné sa stratégie: chercher la conciliation. Au revers de la confrontation annoncée. De fait, hier après-midi la manifestation berlinoise d'opposition à sa visite a réuni moins de monde que prévu, mais des milliers de personnes tout de même.

Contestation «naturelle»

Une contestation qui n'effraie pas ce pape intellectuel. Il la trouve même «naturelle» et «normale», car «elle fait partie de notre liberté», a-t-il confié dans l'avion. «Il est juste que cette opposition s'exprime.» Concluant «il n'y a rien à dire contre quand cette opposition s'exprime sur un mode civil».

Seconde ouverture inattendue: une attitude de compréhension vis-à-vis des catholiques allemands qui, très fâchés, abandonnent purement et simplement l'Eglise à la suite des scandales de prêtres pédophiles: «Je peux comprendre», a encore confié Benoît XVI, «qu'à la vue de telles informations les gens se disent "mon Eglise n'est plus mienne, elle qui était pour moi une force d'humanisation et de moralisation".»

Il a toutefois appelé les catholiques à rester «dans» l'Eglise pour mieux «travailler contre ces scandales terribles» qualifiés de «crimes». Car l'Eglise, a-t-il insisté, où se côtoient de «bons ou de mauvais poissons» n'est pas une «association ou un club sportif» que l'on peut quitter à volonté.

Restaurer l'image de l'Eglise

Une fois ces préliminaires posés, Benoît XVI s'est attaché à restaurer l'image de l'Eglise en expliquant sa nature profonde. Hier soir, lors d'une messe au Stade olympique il a critiqué «les rêves d'Eglise». Mais surtout, hier après-midi, il a évoqué sa place et les limites de son rôle dans la société moderne. Avec un morceau de choix, son discours, rédigé de sa propre main, devant les députés du Bundestag.

Le pape y développe sa vision des «fondements de l'Etat de droit libéral». Sujet inaccessible a priori puisqu'il fait appel à la philosophie du droit mais que Benoît XVI a rendu concret en s'appuyant sur l'expérience du nazisme.

Citant saint Augustin, il a comparé le nazisme à une «grosse bande de brigands» qui avait mis la main sur l'Etat en tordant précisément la notion de droit. «Le droit en vigueur était en réalité une injustice», a souligné Benoît XVI. Démontrant au passage que «le principe majoritaire ne suffit pas» à définir le droit, première étape de son raisonnement.

Se demandant ensuite «comment reconnaître ce qui est juste», il a déploré un «changement dramatique» intervenu au 20e siècle avec ce résultat: «L'idée du droit naturel est considérée aujourd'hui comme une doctrine catholique plutôt singulière, sur laquelle il ne vaudrait pas la peine de discuter en dehors du milieu catholique, de sorte qu'on a presque honte d'en mentionner même seulement le terme.» Autre conséquence: «L'ethos et la religion doivent être assignés au domaine du subjectif et tombent hors du domaine de la raison.» Une situation «dramatique» a-t-il martelé. Elle appelle «d'urgence» et de façon «nécessaire» une «discussion publique».

L'exemple de l'écologie

Mais, c'est alors, dernier axe de son raisonnement, que l'on récuse à l'Eglise, considérée comme une «sous-culture», le droit d'intervenir dans ce genre de débat. Sans faire de «la propagande pour un parti politique déterminé, rien ne m'est plus étranger que cela» - Benoît XVI a alors utilisé l'exemple de la montée en puissance de «l'écologie» dont la plupart des représentants avaient d'ailleurs boycotté la séance! L'apparition du «mouvement écologique dans la politique allemande» démontre, selon lui, «que la matière n'est pas seulement matérielle» et «que la terre porte en elle sa propre dignité et que nous devons suivre ses indications»...

CQFD: la loi naturelle proposée par l'Eglise comme fondement du droit n'est pas, estime le pape, un thème seulement catholique mais une réalité qui appelle «une écologie de l'homme». Et où l'Eglise, conclut-il, a son mot à dire. Les 600 représentants politiques présents, eux, se sont levés pour une longue ovation.

Votre publicité ici avec IMPACT_medias