La chancelière allemande Angela Merkel a réussi à sauver son gouvernement en acceptant de renoncer définitivement à sa politique migratoire généreuse. Ce répit pourrait n'être que de courte durée.
"Le climat dans une coalition gouvernementale n'a probablement jamais été aussi empoisonné que dans celle-ci", a commenté mardi le quotidien Bild, le plus lu d'Allemagne, après l'accord obtenu la veille aux forceps entre la chancelière et son ministre de l'Intérieur rebelle, qui réclamait de réduire fortement le nombre de demandeurs d'asile arrivant dans le pays.
La dirigeante conservatrice a fait l'objet d'une remise en cause sans précédent de l'intérieur même son équipe. Elle va devoir, après presque 13 années au pouvoir, redoubler d'efforts afin de restaurer son autorité et consolider sa fragile coalition gouvernementale, difficilement mise en place en mars, entre son parti de centre-droit CDU, la droite bavaroise CSU et les sociaux-démocrates.
Si le SPD devait rejeter ce compromis, tous les efforts d'Angela Merkel pour sauver son gouvernement seraient remis en cause. Une réunion au sommet des trois partis de la coalition -CDU, CSU et SPD- est prévue mardi à 18h00.
Cible privilégiée depuis 2015
Mme Merkel reste une cible privilégiée pour les courants conservateurs les plus durs, y compris donc au sein de sa propre famille politique. En cause, toujours et encore: sa décision en 2015 d'ouvrir l'Allemagne à des centaines de milliers de candidats à l'asile.
A la tête des frondeurs: le président de la CSU, Horst Seehofer, que la chancelière espérait pouvoir garder sous contrôle en le nommant ministre de l'Intérieur. Mais celui-ci s'inquiète pour son parti qui risque de perdre sa majorité absolue lors d'élections régionales en automne en raison de la percée attendue de l'extrême droite.
Si tel est le cas, les hostilités contre Angela Merkel, accusée de mener une politique trop centriste, repartiront de plus belle.
Victoire apparente
En apparence, Mme Merkel a obtenu une victoire en sauvant son gouvernement et se maintenant au pouvoir. Le fronde lancée contre elle par le parti bavarois CSU la visait aussi elle personnellement, de nombreux médias y voyant une tentative de "putsch" de son aile droite.
Mais sur le fond, elle a dû céder beaucoup de terrain en acceptant de fortes restrictions à l'immigration. Le compromis trouvé avec M. Seehofer sur la politique migratoire marque la fin de politique migratoire généreuse inaugurée en 2015 par la chancelière. L'un des proches du ministre de l'Intérieur, Markus Blume, a d'ailleurs parlé d'un "tournant de la politique d'asile" allemande.