Hors des chemins balisés, le Carpe Dièse Trio revisite le répertoire pour violon, alto et violoncelle au fil de concerts inédits, exigeants. Du jazz manouche aux paillettes des Années folles, la formation basée à Neuchâtel confère à la musique de chambre l'impertinence de quelque noble marquise en goguette.
Sous le titre «Vous avez dit...?», l'ensemble jouera demain, à l'espace de l'Europe (Conservatoire), en première mondiale, une création du compositeur genevois Eric Gaudibert, spécialement élaborée pour le trio.
Sont aussi au programme, deux pièces pour trio à cordes de Sergueï Taneïev (1856-1915), compositeur salué par Tchaïkovski comme le «Bach russe» et pourtant resté méconnu. Entretien avec l'altiste Céline Portat, qui avec Jonas Grenier (violon) et Esther Monnat (violoncelle), forme le Carpe Dièse Trio.
«Vous avez dit...?» Quel drôle de titre pour un concert?
Taneïev est malheureusement méconnu. Quand on évoque son nom, les gens s'exclament: «Vous avez dit... quoi?» Pourtant, son art de la polyphonie faisait l'admiration de ses pairs. Faute de repères, nous avons dû longuement chercher comment mettre en valeur ses uvres.
C'est ce défi qui vous a motivés?
Pas seulement. Nous avons choisi deux de ses trios à corde qui témoignent de son évolution: une uvre de jeunesse (1880), d'une structure encore classique, et son ultime partition chambriste (1913), restée inachevée, un chant du cygne sombre, totalement imprégné de la musique russe romantique.
Du chant du cygne, on passera «D'un coup d'aile» à la création d'Eric Gaudibert. Il y a un lien entre les deux compositeurs?
Eric Gaudibert est beaucoup plus connu que Taneïev. Nous sommes heureux que ce grand compositeur ait accepté de créer une uvre pour nous. Effectivement, sa pièce aérienne, d'une grande douceur, fait un clin d'il à Taneïev, en reprenant le thème principal d'un des mouvements du Russe.
Vos précédents concerts n'étaient-ils pas plus aventureux, plus expérimentaux?
La forme du trio à cordes peut sembler classique, mais le contenu, avec Taneïev comme fil rouge, ne l'est pas du tout.
Neuchâtel: Conservatoire, espace de l'Europe, demain à 17h. En présence d'Eric Gaudibert qui viendra parler de son uvre.