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Se souvenir des terribles choses

14 janv. 2011, 11:06

Avec une sensibilité qu'on ne lui connaissait pas, le réalisateur français Gilles Paquet-Brenner évoque dans son quatrième long métrage la rafle du Vélodrome d'Hiver, deux jours indignes au cours desquels plus de treize milles juifs furent arrêtés par la police française… S'inspirant du roman de Tatiana de Rosnay, le cinéaste nous attache aux pas obstinés d'une journaliste américaine d'aujourd'hui, chargée d'écrire un article sur la «honte» du Vel' d'Hiv. Très sensibilisée par son sujet, Julia Harmond (Kristin Scott Thomas toujours aussi habitée) s'interroge sur les conditions dans lesquelles ses beaux-parents ont hérité de l'appartement où elle s'apprête à s'installer. Bravant le non-dit, elle met alors au jour une «péripétie» particulièrement dramatique de l'un des plus sombres épisodes de la Collaboration.

Juillet 1942, les gendarmes viennent embarquer la famille de Sarah. Agée de dix ans, la fillette a tout juste le temps de cacher son petit frère, en l'enfermant à clef dans un placard. Parquée au Vélodrome, puis enfermée dans un camp de transit en attendant pire, Sarah ne songe qu'à une chose: s'échapper pour revenir à Paris délivrer son frère… N'en disons pas plus, sinon que le cinéaste réussit à mettre en place une partie de ping-pong entre passé et présent qui serre de plus en plus la gorge et le cœur.

Ce chassé-croisé temporel possède deux grandes vertus: la première est celle de nous remettre en mémoire, vécue à hauteur d'enfant, cette page noire d'un passé ignominieux, avec une sobriété bien plus agissante que l'emphase lacrymale du récent «La rafle» qui traitait du même sujet. Autrement rare, la seconde nous incite à dépasser le clivage habituel qui trie de façon trop rassurante les salauds des bonnes âmes. De la part de l'auteur d'un navet comme «Gomez VS Tavarès» (2006), cette plongée dans la complexité profonde de notre humanité ne laisse pas d'étonner!

La Chaux-de-Fonds, Scala 2; 1h51

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