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Ratatouille un peu fade au menu

Le mythique Concombre masqué est de retour, dans une aventure qui amuse, mais peine tout de même à convaincre. La nostalgie n'est plus ce qu'elle était.

03 oct. 2009, 04:15

On ne saurait placer trop haut les premières aventures du «Concombre masqué», dessinées dans les années 60 et 70 par Nikita Mandryka. Celui-ci avait été avec Gotlib, Brétecher et quelques autres, l'un des fers de lance de l'avant-garde bédéique dans «Pilote», avant de se lancer dans l'aventure de «L'Echo des savanes». Le Concombre masqué, «100% végétal donc 100% sain», était alors primesautier, poétique, un peu politique parfois, métaphysique souvent, mais surtout délicieusement absurde et nonsensique.

Déjà au début des années 80 la série s'était orientée vers des récits complets plus engagés où commençait de se perdre la magie des premières histoires. Puis, Mandryka, passant de thérapie en thérapie, nous livra de loin en loin un album plus ou moins nouveau, qui n'était généralement qu'une pâle resucée des premiers volumes. «Le Monde fascinant des problèmes» est ce qu'il a fait de mieux depuis longtemps, et contient quelques bons moments, quand il délire sur les droits des rivets, la pensée inique, les trains de mesures qui ne causent jamais d'accident car ils ne rencontrent jamais personne, mais pourquoi avoir croisé le Concombre et Bogart pour créer le chanteur de charme Lovelace Cucurbite? Et pourquoi les amours de Raymond le rivet et de Pénélope la patate? Pour rien, sans doute, et c'est peut-être suffisant. Mais trop d'allusions ne trouvent leur sens qu'à la lecture des anciens albums, et la pensée de Mandryka, qu'elle évoque le vieux syndicalisme ouvrier ou qu'elle s'inquiète des ravages de la télévision, apparaît terriblement datée et en total décalage avec les problèmes de la société d'aujourd'hui.

Pourquoi, nous-dira-t-on, faire une lecture politique du «Concombre», qui s'en passerait si bien? Mais c'est précisément que Mandryka insiste, saturant ses pages trop lentes, qui déjà respirent mal, de jeux de mots parfois inspirés mais souvent laborieux, développant une intrigue dont le décousu est plaisant, mais n'est pas toujours racheté par l'inspiration et qui, surtout, n'étonne plus après les délires des Sfar et autre Trondheim. Mandryka marque le pas; génial pionnier il y a trente ans, il apparaît aujourd'hui comme un suiveur qui ne saurait rattraper ceux qu'il a inspirés. /ACO

«Le Concombre masqué. Le monde fascinant des problèmes», Nikita Mandryka (scénario et dessin), éd. Dargaud, 2009

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