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Quand Cosette et Jean Valjean apparaissent sous un bonnet de laine

Porter «Les Misérables» de Victor Hugo à la scène? Le jeune metteur en scène Jean Bellorini s'y est risqué avec sa compagnie parisienne. Rencontre au TPR, écrin, demain, de ce long voyage intitulé «Tempête sous un crâne».

27 janv. 2011, 11:50

Jean Bellorini, faut-il une petite dose d'inconscience pour oser adapter «Les Misérables» à la scène?

Je ne sais pas si c'est de l'inconscience, car c'est une histoire populaire. Mais quand on s'y plonge, on peut se rendre compte de la monumentalité, de la beauté, de la grandeur de ce texte. Il est bourré de détails, de toutes petites choses dont on peut se demander à quoi elles servent; mais, finalement, on découvre que tout se répond dans cet incroyable enchevêtrement. Cette histoire fait partie de notre inconscient collectif, on croit la connaître, mais quand on y entre vraiment, on voit qu'on n'en connaissait que les idées générales.

Les comédiens ont un «look» contemporain...

Ce sont des personnages d'aujourd'hui qui nous racontent l'histoire. Il ne s'agit pas du tout d'une reproduction historique, ni d'époque. Je dirais même que les personnages ne sont pas incarnés. Nous sommes dans l'évocation et non pas dans l'illustration, nous sommes dans le théâtral au sens artisanal et poétique du terme. L'idée, c'était de ne pas imposer des images, pour que chaque spectateur, et même chaque acteur, puisse rester dans son imaginaire. Les comédiens sont chargés du texte de Victor Hugo, et, bien sûr, en entrant dans l'histoire ils vont se confondre plus ou moins avec tel ou tel personnage. Nous avons effectué un vrai travail de troupe, de chœur. Dans la première partie surtout, c'est celui qui a le plus envie, sur le moment, de dire telle ou telle chose, qui prend la parole. De longues plages restent de l'ordre de l'improvisation, un peu comme dans un orchestre de jazz où, tout à coup, on se vole le solo.

Comment ramène-t-on ces dizaines d'histoires croisées à 3h30 de spectacle?

L'important pour moi était, évidemment, de garder un fil narratif clair, lisible pour tous. Et en même temps de conserver des passages lyriques, de logorrhées, de détails. L'adaptation reste fidèle au texte, nous n'avons rien réécrit, seulement beaucoup coupé. A la première lecture, la première partie durait 9 heures!

Pour vous, nul doute que ce texte garde encore toute sa force aujourd'hui?

On a un peu oublié à quel point cette langue est poétique et musicale; on a surtout retenu le fond, et même une toute partie du fond, manichéenne. Je ne dis pas que ça ne l'est pas. Mais il y a une beauté de la naïveté, de la simplicité. Aujourd'hui, il ne faut pas avoir peur d'être simple et un peu naïf, je ne dirais pas aveuglément, mais de manière éclairée. Et la pauvreté, la misère sont tellement actuelles, de même que la révolte, l'envie de bouleversement, de changement! La fuite récente de Ben Ali, par exemple, a été une incroyable coïncidence. De même, durant tout le mois d'octobre à Paris, il nous arrivait d'aller manifester l'après-midi et, le soir sur scène, on racontait la révolution.

La musique a une part importante; quel rôle lui attribuez-vous?

Les musiciens sont présents dès le premier jour de répétition. Ils font partie intégrante du rythme cardiaque du spectacle. Ils sont au cœur du souffle de l'acteur, comme peut l'être le texte. Parfois d'ailleurs, ils prennent le relais du texte; les notes deviennent mots, de même que les mots sont souvent plus des notes, dont la musicalité nous touche de façon épidermique. Texte ou notes, je n'arrive pas à dire quels sont, pour moi, les moments les plus musicaux. /DBO

La Chaux-de-Fonds, Théâtre populaire romand, demain à 19h; repas chaud servi à l'entracte

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