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«Les rapports politiques ont toujours été violents!»

29 sept. 2011, 11:21

Comédien, Hervé van der Meulen mâchera ce week-end sa part de pain dur au côté, entre autres, de Robert Bouvier et de Carine Baillod. Distribué dans la pièce de Claudel, qui panache acteurs d'ici et de Paris, le Français figurera encore en décembre à l'affiche du théâtre du Passage à Neuchâtel. En tant, cette fois-ci, que metteur en scène d'un grand vaudeville qui, la saison dernière à Paris, a déclenché des rires en rafale: «La dame de chez Maxim» de Feydeau.

Hervé van der Meulen, quel regard portez-vous sur Turelure, le personnage pas très sympathique que vous interprétez dans «Le pain dur»?

Il n'est pas sympathique a priori, c'est vrai (rire). Il a été président du conseil des ministres sous Louis-Philippe, c'est un personnage à la fois puissant et horrible, coloré et assez drôle. Et qui, avant de mourir, a envie de retrouver sa jeunesse et ses convictions politiques; et l'amour, à travers une jeune femme idéaliste comme lui l'a été. A la fois très durs et très drôles, tous ces rapports, politiques, amoureux et filiaux, offrent une palette formidable à jouer. Et puis, il y a la langue extraordinaire de Claudel. L'ampleur de la tâche m'a parue énorme, mais cette langue, ce personnage sont entrés en moi assez facilement. C'est le rôle de ma vie!

Cette langue de Claudel, justement, quelles en sont ici les particularités?

Elle est très riche du point de vue du vocabulaire. Il s'agit de versets libres, très rocailleux et très poétiques aussi. On s'aperçoit que si l'on respecte le verset claudélien, si l'on intègre la respiration qu'il impose, le rythme ainsi imprimé vous donne la chair, la vie organique du personnage. Tout le reste, toutes les autres clés en découlent.

Le contexte est daté, mais le propos porte aujourd'hui encore?

Complètement. J'ai vu l'autre jour un documentaire intitulé «Les fauves», qui retrace l'histoire de Villepin et Sarkozy. C'est l'histoire de Turelure! Les rapports politiques ont toujours été extrêmement violents. La pièce s'interroge aussi sur le rapport à l'argent, au monde matériel. Elle soulève un questionnement en relation avec la foi, avec sa perte. Dans les autres pièces de Claudel, la foi offre la solution; ici, on vend le crucifix en bronze pour quelques francs, on brade le Christ. Symboliquement, c'est magnifique. Cette interrogation vis-à-vis de la foi - et ce peut être en un idéal aussi - reste très actuelle. On a l'impression que la foi n'a plus sa place dans notre société matérialiste.

Vous avez monté, aussi, «La dame de chez Maxim». Ce vaudeville, c'est un défi?

Au départ, il s'agit d'une commande du Théâtre de l'Ouest parisien. J'ai dit oui dans un grand moment d'enthousiasme (rire). Puis j'ai réalisé que c'est une pièce gigantesque, avec trente personnages, qui normalement dure quatre heures. Un enfer à monter! Mais je me suis rendu compte que chez Feydeau, tout est dans la partition. En respectant toutes ses indications, l'humanité des personnages apparaît aussi, la pièce ne se réduit pas à une mécanique. D'ailleurs, on ne s'intéresserait pas à eux pendant trois heures si c'étaient des fantoches. J'ai essayé d'accentuer au maximum la partition et les traits du jeu, tout en préservant l'humanité des personnages.

Vous avez drapé, par exemple, ces personnages dans des costumes d'époque, mais très colorés...

Des costumes 1900, oui, mais ils sont quand même assez barrés, surtout au 2e acte. Ils sont très dessinés, dans des couleurs très vives; ils n'ont rien de réaliste, le décor non plus. La pièce décrit une société qui, comme chez Claudel, pourrait nous paraître un peu dépassée. Elle l'est par certains points mais, en même temps, sont dénoncées des tares, une cupidité sexuelle, qui n'ont pas forcément changé aujourd'hui. Mais, il n'y a pas que cet aspect-là chez Feydeau. Le côté surréaliste de sa mécanique est important aussi; j'y vois comme une prémonition du théâtre de Ionesco, du théâtre de l'absurde. Dans cette «Dame de chez Maxim», on recourt quand même à un fauteuil extatique, dans lequel on s'endort dès que l'on s'y assied!

Neuchâtel: théâtre du Passage; «Le pain dur»: demain à 20h, samedi à 18h, dimanche à 17h et 20h (supplémentaire). «La dame de chez Maxim»: du 28 au 31 décembre, à 20h.

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