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Les héros antiques investissent la cité et le théâtre du Passage

31 août 2011, 11:03

Antigone. Sophocle comme, deux mille ans plus tard, Jean Anouilh, en a fait l'héroïne d'une tragédie. Une héroïne qui ose dire non, qui s'oppose au roi Créon son oncle, parce qu'il refuse d'enterrer dignement son frère Polynice. Demain sur la scène du Passage transformée en Thèbes assiégée, celle qui se battra pour inverser le cours des choses est une Antigone plus étoffée, telle que l'a mise en perspective Henry Bauchau dans son roman éponyme. Associés, L'outil de la ressemblance et la Cie du Passage ont osé en faire une adaptation, offerte - le spectacle est gratuit! - au public dans le cadre du Millénaire de Neuchâtel.

«Nous avons voulu mettre en avant ce qui fait l'originalité du roman, l'équilibre entre les quatre membres de la fratrie: Antigone, Ismène, Etéocle et Polynice. Nous avons fait en sorte que tous les rôles restent des grands rôles», indique le metteur en scène de la pièce, Robert Sandoz. Cette parité se verra d'emblée marquée par quatre prologues, dits en quatre lieux différents de la ville par chacun des personnages devant une partie du public.

Chargée d'écrire cette pièce centrée sur une génération, Antoinette Rychner s'est fortement immergée dans l'écriture de Bauchau. Elle a ingéré, entre autres, «Oedipe sur la route» et son «Journal d'Antigone 1989-1997». Et, le premier mouvement de peur surmonté, elle a, dit-elle, fait confiance au potentiel théâtral du roman: les personnages formulent les choses, ils s'affrontent, s'influencent ou tentent de s'influencer. «On dit et on accomplit. Le fait de dire est une action.»

«Nous avons obtenu un certain dynamisme», rebondit Robert Sandoz. «Du fait, aussi, qu'il y a des scènes courtes chez Bauchau; toutes ne sont pas contemplatives.» Saisie dans sa vie quotidienne, en proie à la fatigue, à la peur, à la soif, la fille de Jocaste et d'Oedipe n'en accomplit pas moins son destin exceptionnel, incarnant comme ses frères et sœur un idéal, une vision du monde et de la cité. «Bauchau nous offre à la fois une thématique très intime, une analyse pertinente de la famille, de la fratrie, et les grands idéaux qui font que ces êtres humains sont des héros.»

Comment transposer sur scène les hauts remparts de la Thèbes antique? La guerre fratricide qui oppose Etéocle, incarnation du progrès, à Polynice, qu'anime une pulsion plus archaïque? «L'enjeu, c'était de conserver un souffle, une puissance, et un côté très physique, très incarné, avec des moyens sobres et efficaces.» Pour répondre à ces exigences apparemment contradictoires, Robert Sandoz et son équipe ont imaginé une scénographie et des costumes contemporains, sans éradiquer toute trace d'Antiquité. Les décors sont imposants, mais mobiles. On s'entre-tuera torse nu, en vertu des combats rapprochés de l'époque, d'homme à homme, les yeux dans les yeux.

«Ce projet n'est pas un projet factice, il pourrait tenir hors du cadre du Millénaire», situe encore Robert Sandoz. «Il a, en même temps, toute sa pertinence dans ce contexte-là.»

Où se situe, aujourd'hui, le désir de grandeur chez l'homme? Quels sont nos idéaux? Faut-il agir avant tout ou se montrer plus réaliste? Puisées très loin dans nos racines culturelles, ces questions ricocheront, sans doute, sur nos aspirations - ou non-aspirations! - individuelles et collectives

Neuchâtel: théâtre du Passage, du 1er au 11 septembre à 19h, sa à 18h, di à 17h, relâche lundi. Spectacle offert dans le cadre du Millénaire de la ville de Neuchâtel. Réservations indispensables, au 032 717 79 07. Se renseigner sur la localisation des prologues.

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