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Lénine est mort, vive Rocky

25 juin 2011, 12:43

Sur la place Lukiskiu de Vilnius, exit la statue de Lénine, jetée à bas de son piédestal en août 1991. Aujourd'hui, c'est un bronze à l'effigie de Frank Zappa qui voisine avec le vide laissé par la destruction du monument glorifiant le leader soviétique. La force identitaire des statuaires, leur charge symbolique, leur destin tributaire des bouleversements de l'histoire servent de fils rouges à l'exposition d'art vidéo qui s'ouvre aujourd'hui au Centre d'art Neuchâtel.

Sous le titre «Les cadeaux du présent», quatre artistes proposent leurs visions d'un monde à reconstruire: Anri Sala, Aleksandra Domanovic, David Maljkovic, Deimantas Narkevicius. Quatre créateurs inspirés par l'effondrement du bloc soviétique et les ersatz idéologiques, culturels, artistiques mis en place en autant de produits de substitution.

Turbo sculpture décalée

La plus jeune de la bande, Aleksandra Domanovic, tout juste 30 ans, artiste slovène née en Serbie et Berlinoise d'adoption, propose un regard décalé sur la Turbo sculpture. Ce mouvement en plein essor dans les pays de l'ancien bloc de l'Est, intègre un fatras de figures hollywoodiennes telles que Tarzan ou Rocky, dans la création musicale et artistique régionale.

L'art pour oublier la guerre

Dans une saisissante vidéo, le cinéaste albanais Anri Sala, 37 ans, montre comment l'art a investi la ville dévastée de Tirana, les maisons d'un quartier entier ayant été repeintes de couleurs vives. Sala balade sa caméra d'une poésie poignante au fil des rues défoncées en une interrogation lancinante quant à la fragilité de ce décor presque trop joyeux pour perdurer.

A travers l'histoire d'un mémorial désaffecté, transféré dans un décor futuriste, David Maljkovic, vidéaste de 38 ans vivant entre Zagreb et Berlin, s'interroge sur le destin des monuments emblématiques d'une idéologie obsolète.

Enfin, Deimantas Narkevicius, Lituanien de 47 ans, utilise l'histoire de son pays comme matériau premier à des œuvres articulées autour de la manipulation d'images. Ainsi, il filme à l'envers le déboulonnage d'une statue de Lénine devant une foule en liesse, laissant croire que c'est l'installation du monument qui provoque la joie des spectateurs.

«L'Est n'est plus à l'Est...»

Le quatuor d'artistes est issu des «ex-pays de l'Est». Pourtant, l'exposition aurait pu avoir bien d'autres champs de rupture. Tel le Printemps arabe. Arthur de Pury, commissaire de l'exposition avec Marie Villemin et Marie Léa Zwahlen: «Cette notion d'Europe de l'Est fantomatique, inventée par l'Occident, persiste-t-elle uniquement en raison de notre incapacité à définir de nouveaux termes susceptibles de saisir le présent? L'Est n'est plus à l'Est, il est en Orient...» Vingt ans après la destruction des statues de Lénine, n'était-ce pas un autre monument qui volait en éclats sur la place de la Perle, le 18 mars 2011, au Bahreïn?

Mais là, c'était sur ordre du gouvernement qu'une sculpture abstraite, devenue l'emblème de la révolution, était fracassée à coups de marteaux-piqueurs...

Neuchâtel, CAN A voir jusqu'au 24 juillet. Le 2 juillet à 18h, dans le cadre du Festival du film fantastique, présentation du travail d'Aleksandra Domanovic; dès 23h, Caves du Palais, techno party selon une œuvre d'Aleksandra Domanovic, www.can.ch

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