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Le triomphe des myopes...

Les «Histoires à lunettes» de Clarke et Midam déforment joyeusement notre regard quotidien par l'usage sans modération de verres de tous calibres. Cartésiens s'abstenir.

08 août 2009, 04:15

Clarke est un dessinateur curieux: il répugne visiblement à dessiner des personnages dépourvus de lunettes. Chez lui, les pères, les mères, les savants, les ouvriers, les adolescents, les bébés et même l'homme invisible ont des lunettes! (ce qui, dans le dernier cas, pose de sérieux problèmes de discrétion au personnage cité…) D'où le titre général, fort logique, d'«Histoires à lunettes» donné aux petits récits d'une page qu'il signe depuis longtemps, tantôt seul, tantôt avec son complice Midam, dans le journal de Spirou. Ce qui est encore plus curieux c'est que, si l'on en croit certaines photos, Clarke et Midam, eux, ne portent pas toujours de lunettes!

Cela dit, peut-on caractériser les «Histoires à lunettes», que les éditions Dupuis viennent d'avoir la bonne idée d'éditer en albums, par d'autres traits saillants que les verres correcteurs dont sont affectés tous les personnages dessinés? La question est plus difficile. Il est certain que Clarke et Midam pratiquent ici un humour quelque peu anglais, à la limite entre le pince-sans-rire et l'absurde, plus proche des productions généralement éditées par Fluide glacial que par Dupuis. On y voit peu de personnages récurrents, à l'exception toutefois des professeurs Médart et Jenkins dans des gags toujours bâtis sur le même principe: le petit Médart ne cesse de mettre au point des inventions aussi géniales qu'inutiles qui agacent au plus haut point le grand Jenkins.

On retrouvera aussi quelques situations type visiblement affectionnées par nos auteurs: les naufragés qui tirent à la courte paille, les explorateurs en difficulté, les amnésiques chroniques qui allument chaque matin un dictaphone leur rappelant qui ils sont. Surtout, dans «Le miracle de la vie», on découvrira une impressionnante série de variations sur le thème du fardeau de la paternité: de quoi donner d'innombrables (et très mauvais!) arguments aux jeunes couples qui ne désirent pas d'enfants. Clarke, en particulier, affectionne les cases silencieuses qui parlent toutes seules ou les dialogues décalés qui laissent deviner que l'essentiel du gag se passe ailleurs.

Si elles ne sont pas toutes de la même qualité, si certains effets sont moins percutants que d'autres, les «histoires à lunettes» réussissent cependant souvent à modifier notre regard sur le monde qui nous entoure. A chausser sans modération. /ACO

«Histoire à lunettes. Le miracle de la vie», «Histoires à lunettes. Le monde est flou», Clarke (scénario et dessin), éd. Dupuis, 2009

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