Nelson Freire n’aura jamais connu l’angoisse de ne pas savoir quoi faire de ses dix doigts. A l’âge où les enfants escaladent le pommier du jardin, lui déchiffre au piano les partitions de grands compositeurs. A 4 ans, tous ceux qui l’ont entendu faire ses gammes savent que l’avenir de ce petit prodige est intimement lié à l’ivoire des pianos.
Son professeur, qui habite à quatre heures de route de son village brésilien, doit rapidement se rendre à l’évidence. «Après douze leçons, il a dit à mon père qu’il n’avait plus rien à m’apprendre, et que si je voulais évoluer, il fallait que l’on déménage à Rio de Janeiro», à 450 km de là, nous raconte le pianiste au téléphone.
«Et c’est ce qu’on a fait. Mon père a même changé de métier pour ça.» Ainsi, dès l’âge de 5 ans, le jeune Nelson chamboule tous les repères de la...