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Le Lucernois Franz Riedweg, bras suisse de la SS

Franz Riedweg fut le Suisse le plus influent de l'Allemagne nazie. Un historien retrace pour la première fois le parcours de ce protégé d'Heinrich Himmler qui fut condamné à 16 ans de prison en Suisse pour trahison.

30 déc. 2010, 10:24

Pendant longtemps, en Suisse, Franz Riedweg a fait figure de «traître numéro 1 à la patrie». Durant la Seconde Guerre mondiale, celui-ci tirait en effet les ficelles depuis Berlin pour fonder une SS suisse. Dans un livre qui vient de paraître, «Un Suisse au service de la SS - Franz Riedweg (1907-2005)», l'historien Marco Wyss montre que Franz Riedweg, qui n'était que deux rangs hiérarchiques en dessous de Heinrich Himmler, s'était vu attribuer des pouvoirs importants par son chef au sein de l'Ordre noir. C'est ainsi que Franz Riedweg, qui est resté jusqu'à sa mort un nazi convaincu, était notamment chargé du recrutement et de l'«éducation politique» des volontaires de la Waffen-SS dans les pays «germaniques»: Danemark, Norvège, Suède, Pays-Bas, Belgique, France, pays baltes, Croatie, Hongrie et Suisse.

Marco Wyss, comme frontiste (membre de l'extrême droite suisse dans les années 1930), Franz Riedweg a entretenu des liens étroits avec des représentants de la droite bourgeoise tels que Jean-Marie Musy, Rudolf Minger ou Giuseppe Motta. Ces derniers n'étaient-ils pas conscients de sa dérive nazie?

D'un côté, de nombreux politiciens bourgeois étaient très à droite et très anticommunistes et pouvaient par conséquent comprendre la mentalité de Franz Riedweg. D'un autre côté, avant 1938, date de son entrée dans la SS, certains politiciens n'avaient pas pris conscience du point jusqu'où celui-ci était prêt à aller. Après 1938, cette excuse n'était naturellement plus valable. Les politiciens bourgeois ont aussi utilisé les frontistes pour obtenir des majorités politiques, en particulier dans le cadre de votes populaires.

Franz Riedweg fut l'architecte de la «SS germanique» et des unités volontaires de la Waffen-SS en tant qu'élite militaro-politique d'une nouvelle Europe sous direction allemande. Qu'est-ce qui a été décisif pour son ascension rapide au sein de la SS?

La thèse selon laquelle il doit cette ascension rapide à son mariage avec la fille du maréchal von Blomberg est fausse car von Blomberg avait déjà perdu sa fonction de ministre de la Guerre. Le fait qu'il devienne si rapidement le protégé de Himmler, il le doit en tout premier lieu aux cercles anticommunistes suisses regroupés autour de l'ancien conseiller fédéral Jean-Marie Musy en Suisse et autour du Bureau Ribbentrop en Allemagne.

Une autre condition préalable était qu'il ait été un étudiant «germanique» non allemand. Avec sa forte motivation politique, il était en mesure d'obtenir beaucoup de pouvoir, très rapidement, au sein de la SS.

Comme chef de la «SS germanique», il était très proche de Himmler. Quelle était l'influence de Franz Riedweg au «firmament» de son parcours, en 1942-début 1943?

Son influence était relativement grande. Elle provenait du fait qu'il savait se mettre en relation avec des personnes influentes issues de différents cercles. Pas seulement dans la SS, mais également dans l'aristocratie prussienne, le Parti national-socialiste et la Wehrmacht. Il a étendu le recrutement de volontaires pour la SS et la Waffen-SS dans les pays germaniques et non germaniques occupés et a donné un contenu politique à cette tâche. Son accès direct à Heinrich Himmler lui permettait de mettre plus facilement en œuvre ses initiatives.

Mais en même temps, son pouvoir était limité. Bien qu'il fût chef de la Direction germanique, il dépendait de son chef direct, l'Obergruppenführer (général d'armée) Berger. C'est pourquoi il ne lui était pas toujours possible d'en référer directement à Himmler.

En tant que familier d'Himmler, qu'est-ce que Franz Riedweg savait du génocide des Juifs?

Il ne savait peut-être pas tout, mais 99%... Tout d'abord, il évoluait dans les cercles les plus élevés de la SS. Ensuite, les bureaux de liaisons de sa Direction germanique dans les pays occupés faisaient régulièrement des rapports sur la traque et la déportation des Juifs de l'Europe de l'Ouest vers l'Est.

Les camps de concentration étaient surveillés par les unités Totenkopf qui étaient en partie aussi intégrées dans la Waffen-SS. Franz Riedweg avait également à plusieurs reprises rendu visite à des troupes SS combattant sur le Front de l'Est. Il devait connaître la Shoah, que Himmler avait une fois indirectement évoquée devant lui. Il était clairement un de ces complices que les crimes des nazis ne semblaient pas déranger. /RKU

«Un Suisse au service de la SS - Franz Riedweg (1907-2005)», Marco Wyss, Editions Alphil, 276 pages

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