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L'aventure humaine se poursuit dans les Mines de sel de Bex

Il n'y a pas que la neige qui soit de l'or blanc. Si le sel se trouve aujourd'hui partout, il a été pendant longtemps une denrée précieuse. Depuis 300 ans, les Mines de sel de Bex sont la principale source d'approvisionnement du canton de Vaud. Mais l'extraction a demandé des trésors de génie technique qui au fil des siècles n'ont cessé d'évoluer.

17 juil. 2009, 06:30

Une fois monté dans le petit train brimbalant des mineurs, le retour n'est plus possible. Dix minutes de trajet dans un boyau étroit synonymes de hantise pour un claustrophobe ou de joie pour un amoureux des trains miniatures. Dans un bruit assourdissant, des lampes éclairent par intermittence le tunnel. Un kilomètre et demi plus tard, le convoi arrive à destination, au cœur de la montagne salée. Ce n'est qu'une fois dans ce dédale inextricable, où règne une odeur de souffre prononcée, que l'on saisit la dimension de l'enjeu qui a poussé des centaines de mineurs à creuser galeries, puits vertigineux, escaliers sans fin et autres salles sur une longueur de près de 50 kilomètres.

Auparavant, qui avait le sel avait la puissance, et qui n'en avait pas était tributaire du seul bon vouloir de ses fournisseurs et des aléas de la politique. Les Suisses, qui en importaient de l'Europe entière, en consommaient de grandes quantités pour faire du fromage, tanner les peaux ou encore conserver la viande. Son prix était élevé, sans compter le coût du transport et des droits de péage qui venaient s'y ajouter. A 600 kilomètres de la mer, l'or blanc valait vingt fois son prix de départ.

Selon la légende, c'est à un jeune berger menant ses chèvres paître au-dessus de Bex que l'on doit la découverte du site salin au 15e siècle. Pour s'abreuver, ses bêtes montraient une nette préférence pour l'eau de deux sources au goût particulier... C'est ainsi que les habitants se sont mis à consommer du sel local.

Berne, qui envahit la région en 1475 pour contrer Charles le Téméraire, confie l'exploitation des sources à des privés. La teneur en sel est faible: pour obtenir entre 2 et 3 kg de sel, il faut faire évaporer 100 litres d'eau au feu de bois. Ce procédé laborieux sera constamment amélioré, notamment par la création de bâtiments de graduation où l'eau salée s'évapore lentement grâce au vent.

Dès 1680, les sources ayant diminué, les hommes se mettent à creuser des galeries toujours plus profondes dans l'idée de vider l'immense réserve d'eau salée qu'ils imaginent exister dans la montagne. Ce travail gigantesque est réalisé avec massettes et cisettes, des marteaux bien spécifiques, à la lumière des lampes à huile. De l'air est envoyé à coups de soufflet dans des tuyaux de bois. Les mineurs s'orientent avec une boussole et l'avancée est souvent faible: cinq mètres par mois à certains endroits. L'avènement de la poudre noire accélérera le travail.

De nombreuses recherches de sources se soldent par des échecs, mettant plusieurs fois les mines en sursis. Baisse du débit et de la salinité sont courantes. Cependant, les avancées techniques ont permis de les sauver à chaque fois. Les ingénieurs imaginent de grands réservoirs de stockage comme celui de Marie-Louise, du nom de l'épouse de Napoléon, que les visiteurs peuvent voir lors du parcours. Par la suite des dessaloirs, salles de lavage où les rocs salés sont transportés, sont réalisés. L'eau à forte concentration de sel, la saumure, est récoltée et acheminée dans les chaudières des salines par le biais de kilomètres de tuyaux taillés dans des troncs de mélèze.

La découverte en 1836 de grands gisements de sel à Schweizerhalle, près de Bâle, et l'apparition des premières lignes de chemin de fer qui font baisser les coûts de transport, mettent à nouveau en péril les mines. Quatre citoyens de Bex créent alors la Compagnie des mines et salines de Bex. Pour ne plus devoir transporter les rochers et ainsi réaliser des économies, ils ont l'idée de noyer les galeries existantes avec de l'eau douce de la Gryonne, la rivière toute proche. En s'infiltrant partout, elle dissout le sel contenu dans les roches et se transforme en saumure. Il suffit ensuite de pomper. Les mines deviennent rentables et le travail plus aisé.

Le dernier miracle qui va sauver Bex sera l'apparition des foreuses qui permettront de trouver plus facilement de nouvelles sources. Depuis 1960, l'exploitation est grandement automatisée et se fait par forage à injection: de l'eau douce sous pression est injectée dans les trous des sondages et remonte chargée de sel.

Aujourd'hui, les mineurs poursuivent le travail entamé par leurs prédécesseurs dans les Salines de Bex, distantes de quelques kilomètres seulement. Les mines produisent actuellement près de 100 tonnes de sel par jour. Selon les estimations, les quantités d'or blanc contenues dans la montagne suffiront encore pour deux siècles. /NPA

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