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«J'adore voyager avec un texte»

Dominique Blanc fait résonner «La douleur» de Marguerite Duras, à l'affiche à Neuchâtel hier, ce soir à La Chaux-de-Fonds. Un texte poignant, qu'elle a demandé à Patrice Chéreau de mettre en scène. Rencontre.

27 nov. 2009, 10:50

Elle est venue tardivement à la lecture. En réaction, dit-elle, à sa sœur aînée, qui, elle, était une grande lectrice. Dominique Blanc s'est rattrapée depuis, aujourd'hui elle a du mal à passer une journée sans lire. Interprète bouleversante de «La douleur», à voir ce soir encore à La Chaux-de-Fonds, elle s'est plongée dans des ouvrages sur la Deuxième Guerre mondiale, en résonance avec le texte de Marguerite Duras. Rencontre, en toute simplicité, dans un hall d'hôtel, où les courants d'air ne l'indisposent pas plus que cela.

Qu'avez-vous ressenti en découvrant ce texte, que Patrice Chéreau vous a d'abord proposé pour des lectures avec lui?

Un grand coup de foudre. A la fois pour sa beauté et pour sa simplicité d'écriture. Je pense que c'est l'un des plus beaux textes qui soit sur l'attente et sur l'amour. Je ne suis pas une «durassophile», mais j'avais lu Duras. Or je ne connaissais absolument pas ce texte, j'ignorais tout de cette histoire. J'ai eu l'impression de découvrir une autre Marguerite Duras, c'est-à-dire une jeune femme amoureuse et militante, très différente du personnage que l'on a connu par la suite, cet écrivain très médiatisé qui semblait avoir des certitudes sur tout.

Comment s'est opéré le passage de la lecture au spectacle théâtral?

Un soir de lecture, je me suis rendu compte qu'au fond c'était l'histoire d'une femme qui attendait seule chez elle, et que, logiquement et simplement, on devait pouvoir donner chair à cette attente. Le texte n'est pas écrit pour la scène, il fallait, donc, le rendre théâtral, la difficulté était là. Nous avons débuté le travail par des improvisations. Petit à petit, on s'est dit que le projet n'était pas totalement fou, dans la mesure où le personnage parle à la première personne, et se parle aussi. Petit à petit, on a laissé la brochure et on est passé à l'expression théâtrale. Mais Chéreau a proposé dès le premier jour ce dispositif scénique, une table et quelques chaises. J'étais très attachée à l'idée d'un spectacle nomade, je voulais qu'il soit le plus léger possible pour que je puisse le faire voyager.

Pourquoi aviez-vous cette envie?

En fait, chaque fois que j'ai joué au théâtre, que ce soit «Le mariage de Figaro» ou «Phèdre», j'ai eu très envie de faire des tournées. Cela ne s'est jamais fait, car elles auraient coûté trop cher, ou alors les comédiens n'étaient pas libres. Pour moi qui adore voyager avec un texte, c'était une déception. En étant seule, avec une structure légère, j'ai pu assouvir ce désir. Après les représentations à Nanterre, on nous a proposé une première tournée de quatre mois. Et je suis repartie sur les routes; début septembre, on était au Brésil, nous irons aussi à Madrid, à Rome, à Lisbonne. J'en suis très heureuse, parce que ce texte sur la souffrance, sur l'attente, est universel. Je pense qu'il va être repris et joué en beaucoup de langues.

Vous avez travaillé avec Chéreau à de nombreuses reprises, mais c'est la première fois qu'il met en scène un monologue, et la première fois que vous jouez seule...

Je pense que si Chéreau a dit oui à ce projet, c'est en raison de cette grande part d'inconnue. En cours de travail, j'ai trouvé merveilleux d'être seule sur un plateau; puis j'ai paniqué quand il s'est agi de jouer devant le public. Maintenant, je le vis très bien. C'est assez risqué, mais le risque me plaît. Et je trouve très exaltant, très fortifiant, d'interpréter des personnes qui ont été des héros. Un texte aussi fort que «La douleur» apporte énormément sur le plan spirituel. /DBO

La Chaux-de-Fonds, L'Heure bleue-théâtre, ce soir à 20h30

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