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Chambres de bonnes très recommandées

Bourgeois coincé, un agent de change s'émancipe au contact de bonnes espagnoles reléguées sous les toits. Servie par une distribution étincelante, dont un Fabrice Luchini formidablement dépassé par les événements, cette comédie ancrée dans les années soixante, exhale un doux parfum d'utopie à humer sans façon!

23 mars 2011, 11:44

Réalisateur inégal, le Français Philippe Le Guay avait déjà su nous séduire via «Le coût de la vie» (2003) où il épinglait à travers des récits multiples et croisés notre rapport intime à l'argent. Il récidive de manière encore plus convaincante avec «Les femmes du sixième étage», son septième long-métrage, qui constitue sa plus belle réussite. Fils du baron Le Guay, agent de change, le réalisateur des «Deux Fragonards» (1989) s'est permis en la circonstance quelques accents autobiographiques…

A Paris, pendant la guerre d'Algérie, sous le «règne» du général de Gaulle, Jean-Louis Joubert (Fabrice Luchini) mène une existence très réglée dans son appartement sis dans un immeuble des beaux quartiers. Agent de change pointilleux qui a repris l'agence de papa, le voilà obligé de renvoyer une domestique trop curieuse. Après avoir fait l'expérience cuisante d'une vie sans domesticité, cet homme qui croit en son bon goût infaillible et à sa supériorité de classe embauche une nouvelle bonne à tout faire, au grand soulagement de sa femme Suzanne (Sandrine Kiberlain) littéralement débordée par ses loisirs. La servante engagée est espagnole et a du caractère. Prénommée Maria (Natalia Verbeke), elle n'est donc nullement corvéable à merci! Attiré par sa forte personnalité, Joubert va dès lors prendre plus que de raison le chemin des escaliers qui mènent aux chambres hautes. C'est là que vit sans confort une petite communauté de bonnes espagnoles, très haute en couleur, où bigotes et communistes font bon ménage. Au contact de ce gynécée d'humble extraction, le bourgeois se métamorphose, s'évade de ses certitudes étriquées, au dam de son épouse qui le soupçonne d'entretenir une liaison avec l'une de ces «étrangères». Souvent très drôle, cette comédie de mœurs (comme on disait jadis) ne verse jamais dans la caricature et raille en douceur les rapports de classe entre maîtres et serviteurs. En résulte un éloge chaleureux de la solidarité et de l'ouverture qui vaut évidemment pour aujourd'hui! Si la distribution ibère ne manque pas de pittoresque (avec une mention spéciale à Carmen Maura), c'est indéniablement Fabrice Luchini qui crève l'écran. Fils d'immigrés italiens, l'ex-acteur fétiche de Rohmer excelle dans un rôle de composition qu'il commence à affectionner depuis «La fille de Monaco» (2006). A l'instar de l'avocat pincé du film d'Anne Fontaine, son Joubert se laisse insidieusement gagner par une appétence irrésistible, jusqu'à renier toutes les valeurs qui avaient jusque-là borné son existence. Un régal! /VAD


Réalisateur:
Philippe Le Guay
Genre: comédie
Durée: 1h45
Age: 7 ans, suggéré 10
Avec: Fabrice Luchini, Sandrine Kiberlain, Natalia Verbeke
Cinémas: Bio et Studio, Neuchâtel; Scala 3, La Chaux-de-Fonds

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