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C'est la fin d'un monde, et ils l'ont su

26 sept. 2011, 11:56

«Un homme sage a dit: «La sagesse, lorsqu'on est à une fête, c'est de savoir quand il est temps de partir». Nous avons bâti quelque chose d'extraordinaire ensemble. Nous avons conçu cette chose. Et à présent, nous allons nous en séparer.» C'est par ces mots que Michael Stipe s'adressait jeudi dernier aux fans de R.E.M., annonçant l'arrêt de l'un des derniers groupes de stade en activité.

«Savoir quand il est temps de partir»... Pour imprimer dans l'Histoire du rock la marque que ce groupe né en 1981 à Athens en Géorgie mérite de laisser, peut-être aurait-il dû lâcher l'affaire il y a une dizaine d'années, au sortir de cet âge d'or du rock alternatif que furent les années 90. Et surtout, avant ces quatre derniers albums («Reveal» (2001), «Around The Sun» (2004), «Accelerate» (2008) et «Collapse Into Now» (2011)... oscillant entre redites et réinventions sans génie...

Distinction

Mais, comme dit l'adage, mieux vaut tard que jamais. Et malgré quelques commentaires moqueurs inhérents au statut de tout rocker en fin de parcours, R.E.M. aura eu le grand mérite de mettre un terme à ses aventures en Hi-Fi avec cette distinction qui a caractérisé sa carrière. Ni esclandre à la Oasis, ni tournée d'adieu à rallonge, ni bataille par avocats interposés autour des droits d'auteurs. «Nous avons toujours été un groupe au sens le plus pur du terme. Des frères qui s'aiment et se respectent sincèrement... Nous avons pris cette décision ensemble, amicalement et dans le meilleur intérêt de chacun. Le moment nous semble venu, tout simplement», statuait le guitariste Peter Bucks.

Le succès, avec classe

Kurt Cobain, fan absolu du groupe alors qu'il était au pinacle de sa gloire, a déclaré un jour: «Ils ont géré le succès comme des saints et ils continuent à produire de la belle musique.» Cette phrase résume le tour de force accompli par R.E.M. Accéder à la starification planétaire sans rien renier de ses racines alternatives. Combler, à force de titres faussement évidents, le fossé séparant l'underground et le grand public. Ce même fossé où le leader de Nirvana s'est définitivement abîmé le 8 avril 1994.

Taillé pour les stades

Il est vrai que depuis son premier gros succès avec «The One I Love» en 1987 et une signature chez Warner, R.E.M. est parvenu à préserver son intégrité artistique. D'autres groupes issus du même terreau indépendant, The Replacements, Hüsker Dü, Sonic Youth ou les Minutmen, resteront plus confidentiels. Plus cultes peut-être aussi. Mais R.E.M. est sur la voie de la gloire et enchaîne dès «Out Of Time» (1991), et le single «Loosing My Religion», sur une série de disques qui en font un groupe capable de remplir des stades partout sur la planète («Automatic For The People» (1992), «Monster» (1994) et «New Adventures In Hi-Fi» (1996). Et ce malgré six ans passés sans tourner, entre 1989 et 1995. C'est d'ailleurs suite à ce retour sur scène, lors de la tournée «Monster», que le batteur Bill Berry se voit contraint de quitter le groupe. Ce soir de mars 1995 à la patinoire de Malley à Lausanne, où il est victime d'une rupture d'anévrisme en plein concert...

Fort de son aura mondiale, R.E.M. s'engage également socialement et politiquement. Mais là où U2 - Bono surtout - adopte un ton messianique et cherche l'action globale, R.E.M. soutient des politiciens en campagne dans son état, la Géorgie. Ou donne durant ses concerts une tribune à Amnesty International ou Greenpeace. «Je maintiens que la musique et la politique sont comme l'eau et l'huile. Elles ne se mélangent pas. Mais, nom d'un chien, je vais essayer! Même si je marche sur une corde très fine...», déclarait, lucide, Michael Stipe.

La fin d'une ère

Au bout du compte, R.E.M. aura par deux fois joué un rôle charnière dans l'évolution de la musique moderne. D'abord en faisant entrer dans le mainstream la culture du rock indépendant au début des nineties, ouvrant la voie à Nirvana, à Pavement ou aux Pixies. Puis, en signant, en s'arrêtant, la fin d'une ère. Celle où MTV passait des clips, où les médias avaient le pouvoir de soutenir l'émergence de courants musicaux forts, socialement porteurs.

Nostalgie et inquiétude

Aujourd'hui, R.E.M. se retire de la lumière, alors même qu'on commémore les vingt ans du «Nevermind» de Nirvana. Ce n'est pas un hasard... Le rock contemple sa gloire passée avec nostalgie, et lorgne avec inquiétude en direction du futur incertain que lui dessineront les nouvelles technologies. «It's the end of the world as we know it», chantait Michael Stipe en 1987 déjà. En 2011, le monde de la musique a effectivement beaucoup changé. Et R.E.M. le quitte avec une dignité belle à voir.

Plus de renseignements:
www.remhq.com

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