Votre publicité ici avec IMPACT_medias

«A Paris, je suis toujours la Suisse de service»

Après un succès scénique de dix ans, «Arrête de pleurer Pénélope» se déclinera un jour au cinéma. En attendant, la comédienne suisse Christine Anglio travaille à une nouvelle pièce. Rencontre chaleureuse dans une brasserie du Châtelet, à Paris.

30 mars 2009, 12:07

Il y a la blonde et libérée Chloé, jouée par Juliette Arnaud. Il y a la survoltée et noiraude Léonie, qui a le visage de Corinne Puget. Et la brune Pénélope, ingénue et nunuche, qui, en 1998, a donné son nom à la pièce «Arrête de pleurer Pénélope». Une œuvre déclinée en un deuxième épisode depuis, et qui en connaîtra un troisième sur grand écran.

Pénélope, c'est Christine Anglio, qui un beau jour de 1994, quittait Couvet, dans le Val-de-Travers, pour «monter à Paris». A la fin de cet hiver, elle et ses deux collègues actrices ont terminé la première mouture du scénario de leur film.

En 1994, vous avez quitté Couvet pour le Cours Florent à Paris. Quel souvenir gardez-vous de ce grand saut?

J'avais 20 ans, je me sentais un peu à l'étroit, un peu oppressée, à Couvet: cette ambiance de village, où chacun sait ce que fait chacun, et juge chacun. Arriver dans une ville où tout le monde se contrefout de savoir ce que vous faites, ça m'a fait un bien fou.

Il y a l'euphorie du début, et ensuite, la réalité. Il commence à y avoir les galères de thune, de boulot, les cours… Au Cours Florent, je me suis rendu compte qu'on était 900 en première année à vouloir faire ce métier! Avec des gens bien meilleurs que moi, plus cultivés! Alors il a fallu s'accrocher; moi, j'ai tenu à l'orgueil!

Comment a poussé, à Couvet, cette envie de comédie?

Je crois que c'est à cause de la magie du cinéma, du spectacle. Mais quand on a une démarche de «fan», on déchante très vite: en passant de l'autre côté du miroir, on se rend compte que les comédiens sont des gens normaux, avec leur mesquinerie, leur méchanceté, tout ça… Mais oui, même si c'est une expression bateau, c'est la «magie du spectacle» qui m'attirait.

J'avais des parents très cinéphiles. J'ai des souvenirs de films qui remontent à ma petite enfance à Lausanne. Ensuite, à Couvet, il y avait un cinéma, et pas grand-chose d'autre à faire. Avec mon frère, on était donc tout le temps fourrés là.

Quand vous êtes arrivée à Paris, comment avez-vous vécu le syndrome du «petit Suisse»?

Au début, c'est vrai, il y a les «ou bien», les «ça joue», les «septante»! On m'a beaucoup dit - et ça m'a beaucoup énervé: «T'es très cool pour une Suisse». Je demandais aux gens s'ils connaissaient d'autres Suisses, et ils me disaient non. Fin de la conversation.

Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, j'ai perdu mon accent, je dis «soixante-dix», et on me laisse tranquille! Remarquez, je suis toujours «la Suisse» de service. Mais en France, c'est plus facile d'être la Suisse de service que l'Arabe de service. C'est moins difficile à vivre, on me demande moins mes papiers!

Il y a «Pénélope 1», «Pénélope 2», puis bientôt le film; vous rentabilisez à fond! Où en êtes-vous avec le film?

On est les Patrick Hernandez du théâtre! Notre but secret, je vous l'avoue, c'est de vivre toute notre vie sur une seule idée! Ce serait rentable. On a fini d'écrire la première version du scénario du film. On s'est appliqué à écrire des vrais rôles pour les autres, de manière à ce que tout ne tourne pas autour de nous trois: on a aussi envie d'attraper de vrais bons acteurs! A trois, on est arrivé au bout du bout, je pense. C'est donc une façon de continuer à jouer ces personnages auxquels on est attaché, mais en ouvrant le truc.

Vos relations restent-elles intactes?

Ça laisse des zones de non-dit. Encore que nous, quand il y a un problème, on essaie de crever l'abcès. On met aussi des choses de côté: on arrive assez bien à cloisonner, sans trop s'en vouloir de ce qui nous arrive ou ne nous arrive pas. En même temps, c'est la vie: c'est comme les amis, comme un couple. Il peut y avoir de la chance, de la malchance, de l'envie, de la jalousie, puis la roue tourne... Oui, c'est comme ça, c'est la vie.

Trois carrières ne se développent pas en parallèle. Comment vivez-vous les différences de parcours des unes et des autres?

Il ne faut pas se mentir, ce n'est pas forcément facile. Mais une fois qu'on comprend comment fonctionne ce métier, c'est con de se fracasser pour ça. La question n'est pas que les gens soient bons ou pas bons, talentueux ou non. Surtout en France! Il y a aussi des coups de pot, des rencontres.

Juliette est passée par la télé, ce qui a un impact énorme. Moi, on ne me reconnaît pas dans la rue. On ne fait pas le rapport avec Pénélope. J'ai une image moins typée, c'est donc plus compliqué, cela va prendre plus de temps. /BLE

Cet article est tiré du site ww.swissinfo.ch

Votre publicité ici avec IMPACT_medias