L'actrice Audrey Tautou fait ses débuts sur les planches au Théâtre de la Madeleine à Paris dans «Maison de poupée» du Norvégien Ibsen, un beau rôle de jeune femme frivole et insouciante qui se réveille d'un long cauchemar à la Tim Burton.
Dans le salon bourgeois d'une demeure du 19e siècle, Nora (Audrey Tautou) incarne une femme façonnée par les goûts de son mari Torvald Helmer (Michel Fau, qui signe également la mise en scène).
Son bonheur trop parfait se lézarde quand un événement lui fait brutalement prendre conscience que son mariage est construit sur le mensonge et les faux-semblants. La jeune oie blanche choisit d'abandonner mari et enfants pour s'évader de sa cage dorée.
Ce propos avant-gardiste sur la femme a retenti comme une provocation dans la bonne société norvégienne des années 1870.
Costumes extravagants, yeux charbonneux et mines blafardes: l'adaptation de Michel Fau flirte avec les films expressionnistes de Tim Burton («Edward aux mains d'argent», «Les noces funèbres»...), à mesure qu'une atmosphère lugubre et menaçante s'installe.
Le décor est volontairement étouffant: le lent rapprochement vers le devant de la scène des murs du salon amplifie un sentiment latent de tension, sur le point d'éclater.
Engoncée dans une robe bleu pastel, Audrey Tautou, 33 ans, campe une femme-enfant délicate, papillonnant pour plaire à son mari. Sa voix haut perchée devient plus grave lorsque «l'alouette», surnom donné par son époux, prend son envol.
Sa prestation sur les planches enchante par sa fantaisie et son énergie. Le reste de la distribution, affreusement grimée, à l'image d'Hélène (Flore Boixel), la bonne des Helmer, respire la laideur humaine. Michel Fau est épatant en mari amoureux mais parfaitement odieux, Pascal Elso (docteur Rank) est sobre et désespéré. Sissi Duparc (Madame Linde) et Nicolas Woirion (Krogsatd) incarnent avec justesse deux étranges naufragés de la vie. /ats-afp