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«Il faut être un peu marginal pour devenir forgeron»

Qu'ils travaillent le cuir, le fer ou le bois, des artisans qui se font rares exercent encore aujourd'hui leur profession en perpétuant des méthodes et des gestes traditionnels.

21 juil. 2011, 09:10

La forge, c'est son métier. Les cloches, c'est sa passion. Daniel Gebhard est forgeron et maréchal-ferrant. A la rue de la Vieille-Forge 1 à Ballens - un petit village du district de Morges dans le canton de Vaud - il partage son atelier avec son fils. «Le métier de forgeron n'est plus rentable de nos jours et peu passionnant, alors nous ferrons aussi les chevaux. Enfin, surtout mon fils. Mon truc à moi, c'est de forger des cloches», déclare-t-il au côté de sa vieille forge aux effluves de soufre.

Un métier en voie d'extinction

Jusque dans les années 1970, le métier de forgeron était lié à l'agriculture. Le forgeron travaillait en étroite collaboration avec le charron dans la fabrication d'outils et de machines agricoles. Avec le développement technologique, les forgerons ont été de moins en moins sollicités. «J'ai commencé mon apprentissage en 1975. A ce moment-là, le travail commençait déjà à perdre en intérêt. J'ai donc fait un double apprentissage et j'ai appris le métier de maréchal-ferrant.»

Deux professions complémentaires pour quelqu'un qui vient d'une famille d'agriculteurs. «J'ai toujours aimé les chevaux et les machines agricoles. J'aurais voulu devenir paysan, mais le destin en a voulu autrement», raconte l'homme aux yeux bleus et aux mains noires de charbon.

En 1984, Daniel Gebhard ouvre une entreprise de machines agricoles, un secteur dans lequel le travail ne manque pas. «Ça marchait très bien et ça a duré jusqu'à la fin des années 1990. Avec la modernisation de la mécanique, des sommes d'argent colossales étaient fréquemment en jeu et je n'ai pas voulu continuer dans cette voie-là.» Sa double formation rime avec double journée de travail. A côté de la gestion de son entreprise, Daniel Gebhard continue son activité de maréchal-ferrant. Il passe ses fins de journée à ferrer des chevaux pour arrondir les fins de mois.

Virage à droite vers la maréchalerie

L'entreprise de machines agricoles est fermée en 2001. Avec son fils, Simon, ils se consacrent, dès lors, uniquement à la maréchalerie. «C'est surtout le truc de mon fils. Il est beaucoup plus doué. Moi, je ferre à l'ancienne, c'est-à-dire que quelqu'un tient le pied du cheval pendant que je ferre, alors que Simon fait tout en même temps. Il est beaucoup plus rapide et efficace», nous confie-t-il. Simon Gebhard, âgé de 29 ans, ferre entre quatre et six chevaux par jour. Depuis que le cheval est devenu un animal de loisirs et de compétition, la demande en maréchaux-ferrants est forte. «A l'inverse, le métier de forgeron tend à disparaître», explique Daniel Gebhard. «Aujourd'hui, l'essentiel du travail du forgeron est d'assembler des métaux afin de confectionner des barrières, des rampes, des balcons ou encore des portails. Les commandes proviennent de particuliers, de sociétés ou de communes. C'est un travail peu passionnant. Les jeunes forgerons rêvent de «forge à chaud» à l'aide de leur marteau et d'une enclume.»

La formation des plus jeunes

Daniel Gebhard a remis l'entreprise de maréchalerie à son fils en 2006. «Pour ne plus être tout le temps dans ses pieds, je me suis dit qu'il fallait que je trouve une autre activité. J'ai commencé à enseigner», indique-t-il en rigolant. «Depuis cinq ans, j'enseigne environ à 50% à l'école professionnelle de Lausanne, et durant les autres 50%, je donne un coup de main à mon fils. Je garde également toujours un peu de temps pour mes cloches.» Juste après son apprentissage, en 1982, Daniel Gebhard a appris à forger les cloches chez un spécialiste. Une passion naît. «Dans ce métier, il est important d'avoir un domaine de prédilection, il faut trouver sa voie. Pour certains, ce sont les épées ou les couteaux, moi c'est les cloches».

Dans un feu atteignant les 1200 degrés, Daniel Gebhard fait chauffer un chablon de cloche en tôle. Une fois la tôle rouge vive, il la forge au moyen de son marteau et de l'enclume. L'opération est répétée plusieurs fois jusqu'à l'obtention de la forme adéquate. Puis, s'ensuivront plusieurs étapes et environ une journée de travail avant d'obtenir le produit fini. «Il faut aimer le feu et il faut être un peu marginal pour faire ce métier», s'exclame-t-il. J'apprécie beaucoup le travail de la «forge à chaud», mais je ne le ferais toutefois pas à longueur de journée. C'est éprouvant, et je ne suis plus tout jeune.»

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