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Un monde débarrassé de l'inflation

10 sept. 2011, 10:44

Il est des postes qui offrent parfois un point de vue singulier sur la marche du monde et de ses grandes affaires. Pendant 22 ans, entre 1986 et 2008, Aloïs Bischofberger a occupé l'un d'entre eux en tant que Responsable de Credit Suisse Economic Research. De la chute du mur de Berlin à la fin de l'URSS, de la mondialisation aux crises des dettes souveraines, c'est par le prisme de l'économie qu'il a observé ces chamboulements qui relèvent certes de l'histoire mais dont nous vivons encore les conséquences. Des frontières ont changé, des monnaies se sont fondues dans une nouvelle tandis que la finance a augmenté la volatilité de tous les marchés. Rencontre au présent entre passé et passif, entre actions et actif.

Votre carrière a aussi été ponctuée de krachs, de crises et d'explosions de bulles spéculatives très rapprochées. L'économie a-t-elle perdu de vue les cycles longs?

Les cycles longs sont toujours à l'œuvre, mais ils sont masqués par les fluctuations rapides de la finance et de l'économie mondiale. Cependant, on peut distinguer un cycle à l'œuvre depuis les années 1980: celui de la désinflation.

La lutte est menée dans le monde entier. En Amérique du Sud on a connu des taux d'inflation de 1000%. Dans les économies développées, les taux étaient souvent à deux chiffres. Aujourd'hui, on est autour des 1% à 3% et, dans le monde, l'inflation est inférieure à 10%. Enormément de progrès ont été accomplis.

L'inflation maîtrisée, quel est maintenant le but à atteindre?

Nous entrons dans une période qui va se caractériser par le désendettement des Etats conjugué à une phase de croissance économique mondiale beaucoup plus lente. Même si celle de la zone Asie-Pacifique et des pays émergents restera toujours supérieure à la nôtre.

La période actuelle est marquée par la pression baissière sur les prix et sur les salaires. Ne redoutez-vous pas un risque déflationniste?

Je crois qu'il faut distinguer le court terme et le long terme. Dans les trois à cinq ans, ce risque n'existe guère car en Europe, aux Etats-Unis et même en Suisse, on a dégagé des liquidités et beaucoup augmenté la masse monétaire en circulation.

A court terme, ce n'est pas très dangereux. Ce type d'action peut avoir un effet inflationniste et les Etats pourraient être tentés de soulager ainsi les termes réels de leur dette. Des voix s'élèvent aux Etats-Unis pour dire qu'une inflation à 5 ou 6% est tolérable. Mais à long terme, le ralentissement de la croissance peut générer une pression déflationniste. Et la politique monétaire n'est pas toujours un instrument efficace pour la combattre.

C'est l'exemple du Japon où la hausse de la masse monétaire s'est conjuguée pendant des années avec la pression déflationniste.

Vous avez vu l'émergence de l'économie mondialisée, son expansion et sa critique. Quel regard portez-vous sur la mondialisation?

C'est effectivement un concept ambigu. Les pays émergents qui ont ouvert leurs marchés du travail comme celui des biens et services en ont profité. Des pays industrialisés à forte valeur ajoutée comme l'Allemagne ou la Suisse ont su exporter dans un environnement économique plus difficile. Mais des pays en souffrent. Je pense ainsi à l'Italie ou à la Grèce. Ce sont des pays où la productivité stagne. La compétitivité, tellement importante dans un monde globalisé, en a souffert. Là où les marchés du travail restent trop encadrés on sent des freins aux anticipations des entreprises.

En Chine le «gap social» entre ceux qui sont rapidement devenus très riches et la grande pauvreté doit éveiller la vigilance et peut poser des problèmes. Il y a déjà eu des grandes manifestations de mécontentement.

Il faut peut-être s'attendre à davantage de tensions et à un ralentissement de la croissance chinoise.

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