Dans le contexte actuel, ce n'était pas gagné d'avance. Il a fallu que le Bureau de l'intégration, un organe commun aux départements de l'économie et des affaires étrangères, travaille d'emblée dans un esprit de compromis pour obtenir ce résultat. Mais pour l'heure, c'est la voie bilatérale qui continuera à occuper le devant de la scène. «Aussi longtemps qu'elle servira nos intérêts», souligne Micheline Calmy-Rey.
Pour la cheffe du département fédéral des affaires étrangères, la politique européenne ne peut pas se réduire à la question de l'adhésion. «Il ne faut pas confondre les instruments et les objectifs, explique-t-elle. L'objectif est de défendre au mieux les intérêts de la Suisse. L'adhésion peut être un instrument propre à atteindre cet objectif mais nous pensons qu'actuellement c'est la voie bilatérale qui sert le mieux nos intérêts».
Concrètement, cela signifie que le Conseil fédéral va d'une part s'attacher à la gestion et à la mise à jour des accords existants, d'autre part envisager d'autres domaines de négociation. Un accord de libre échange dans le domaine agricole est aussi envisagé (lire ci-dessous). Attention, avertit Micheline Calmy-Rey, «le rejet de la base légale pour la contribution suisse aux nouveaux membres de l'UE compromettrait sérieusement ce programme. Il pourrait même avoir des effets négatifs sur Schengen et l'accord sur la fraude qui n'ont pas encore été ratifiés par l'UE.»
Si la voie bilatérale est aujourd'hui jugée prioritaire, cela ne signifie pas que la Suisse est condamnée à l'emprunter jusqu'à la fin des temps. Cette décision sera périodiquement réexaminée sur la base de trois critères: le degré de participation de la Suisse à la prise de décision dans le cadre des accords bilatéraux, la volonté de l'UE de continuer ce partenariat et l'évolution des conditions-cadres économiques, en particulier dans le domaine monétaire.
Si ces conditions devaient changer, la Suisse devrait adapter ses instruments de politique européenne. Outre le dégel de la demande d'adhésion, elle pourrait alors envisager une union douanière, la conclusion d'un accord-cadre, la participation à un Espace économique européen bis, ou encore une intégration différenciée à l'UE. «Il n'y a qu'une option qui n'est pas envisageable, c'est la fermeture», souligne la cheffe du DFAE. Pour Joseph Deiss, le rapport Europe 2006 a le mérite de dédramatiser le débat.
Ce document analyse les effets des principaux instruments politiques sur une vingtaine de thèmes-clés tels que la démocratie directe, le fédéralisme, la neutralité, le marché du travail, les finances publiques, la fiscalité ou les infrastructures. Le coût de l'adhésion est estimé à 3,4 milliards de francs par an tandis que la voie bilatérale revient actuellement à quelque 440 millions par an, sans compter le milliard promis aux pays de l'Est sur cinq ans.
Le chef du DFE souhaite cependant que l'on ne se focalise pas sur ces chiffres qui sont évolutifs. L'important pour lui est de s'engager sur une voie praticable et d'abandonner les guerres de religion. / CIM