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La betterave se prête difficilement à la culture bio

Quatre-vingt hectares de betteraves sucrières sont cultivés dans le canton de Neuchâtel. Des champs qui sont rapidement envahis de mauvaises herbes, rendant difficile une culture biologique.

29 oct. 2019, 08:00
Dans le canton de Neuchâtel, aucune surface de betteraves sucrières n'est cultivée en bio.

Près de 18 000 hectares de surface agricole utile (dont 0,1% en bio), sur le million que compte la Suisse, sont destinés à la production de betterave sucrière.

Dans ses usines d’Aarberg et de Frauenfeld, l’entreprise Sucre Suisse SA en transforme l’intégralité. Selon son site Internet, «pour produire un kilo de sucre cristallisé, il faut couper et presser huit à neuf betteraves.» Le pourcentage moyen de sucre dans chaque racine s’élève ainsi à environ 16%. «Un hectare contient jusqu’à 90 000 plantes et produit entre 10 000 et 15 000 kilogrammes de sucre, soit suffisamment pour 400 consommateurs.»

Dans le canton de Neuchâtel, cette racine est cultivée de manière conventionnelle sur 80 hectares, «dans le cadre d’un contrat avec la sucrerie d’Aarberg», précise Yann Huguelit, directeur de la Chambre neuchâteloise d’agriculture et de viticulture (CNAV).

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«Le désherbage fait toute la différence»

Semée au printemps, la betterave sucrière est récoltée dans le courant du mois d’octobre. Johnny Ruchti, agriculteur à Engollon, explique que «les racines ne doivent pas être sorties du sol plus d’une dizaine de jours avant d’être livrées à l’usine, car leur teneur en sucre s’appauvrit à l’air libre.»

Mais avant de pouvoir acheminer la production de ses neuf hectares – entre 80 et 100 tonnes de betterave par hectare – vers le canton de Berne, l’agriculteur doit faire face à une importante concurrence des mauvaises herbes. «Dès le semis en avril et jusqu’à la fermeture des rangs début juin, les interventions pour limiter les mauvaises herbes sont très exigeantes», note Yann Huguelit.

La gestion à la main pour conserver des parcelles propres étant encore plus délicate en bio, plus aucun agriculteur ne la cultive de cette manière dans notre canton.
Yann Huguelit, directeur de la Chambre neuchâteloise d’agriculture et de viticulture

«Le désherbage fait donc toute la différence», explique Johnny Ruchti, qui procède à trois traitements herbicides avant que la betterave ne couvre le sol.

«Les quantités et les produits utilisés varient en fonction de la flore adventice présente, ainsi que du seuil de croissance des betteraves par rapport à celui des mauvaises herbes. L’objectif est de procéder aux traitements nécessaires le plus tardivement possible afin de ne pas ralentir la croissance de la betterave, tout en diminuant au maximum les dosages.» Contre les chénopodes, l’agriculteur d’Engollon procède même à un désherbage manuel.

«La gestion à la main pour conserver des parcelles propres étant encore plus délicate en bio, plus aucun agriculteur ne la cultive de cette manière dans notre canton», explique le directeur de la CNAV.

Le démariage, une technique ancienne

Dans le Vully, en revanche, Yves Gaillet s’est lancé dans l’aventure cette année.

En plus du désherbage mécanique qui lui permet de nettoyer l’espace entre les rangs, il estime, pour l’hectare qu’il cultive, à 150 le nombre d’heures de travail nécessaires pour le désherbage manuel. Il explique ce temps par son choix d’utiliser une technique datant d’une époque «peut-être pas ancestrale, mais de nos grands-parents: le démariage des betteraves».

La betterave est une culture bien payée pour le producteur, mais il est pour l’heure difficile de justifier auprès du consommateur un prix plus élevé pour un produit de base tel que le sucre.
Yves Gaillet, producteur de betteraves

Au lieu de planter une graine tous les 18 centimètres sur une ligne comme généralement pratiqué, il les sème à une dizaine de centimètres l’une de l’autre. Le fait de doubler le nombre de plantes à l’hectare lui permet ainsi de choisir lesquelles il laissera atteindre leur maturité. «Quatre à six semaines après le semis, je laisse les plus belles dans mon champ et je coupe les autres, ce qui prend un temps considérable», remarque Yves Gaillet.

Après une année de production de betteraves en reconversion biologique qui s’est soldée par un échec financier, l’agriculteur espère que cette technique lui assurera un meilleur rendement.

«La betterave est une culture bien payée pour le producteur, mais il est pour l’heure difficile de justifier auprès du consommateur un prix plus élevé pour un produit de base tel que le sucre, lorsqu’il est issu d’une production biologique. Tant que les prix restent tels qu’ils sont, il s’agit toutefois d’une culture intéressante pour les exploitations biologiques, qui apportent une plus-value à l’hectare», estime Yves Gaillet. 

Anthea Estoppey

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