Chaque année, en voyant la nouvelle photo officielle du Conseil fédéral, vous vous demandez: «Qui est ce monsieur que je ne connais pas, à côté des sept autres?» Et bien, ce monsieur est le chancelier de la Confédération Walter Thurnherr et, à l’âge de 60 ans, il a annoncé mercredi sa démission pour la fin de l’année, après huit années à la Chancellerie.

Sa succession se jouera le 13 décembre, le même jour que la succession d’Alain Berset à l’exécutif.

Tous les partis ont loué mercredi «ce serviteur de l’Etat par excellence», selon les termes du président de son parti, le Centre, Gerhard Pfister. L’influence de cet Argovien sur le Conseil fédéral a été importante, notamment à ses débuts en 2016, grâce au tandem qu’il formait avec une autre centriste de son canton, la conseillère fédérale Doris Leuthard, dont il fut le secrétaire général durant de longues années.

«La pire législature depuis la Seconde Guerre mondiale»

«J’ai toujours eu une certaine influence, mais je ne vote pas», a reconnu Walter Thurnherr. Le chancelier participe à toutes les séances du Conseil fédéral avec une voix consultative. Mais à ses yeux, il n’est «pas là pour donner son avis personnel», mais plutôt pour «rendre attentif le collège à des expériences déjà faites», «trouver de la cohérence dans la communication» ou encore «proposer une formulation pour une solution de compromis».

L’Argovien a levé un petit coin du voile sur la vie interne du collège lorsqu’un journaliste lui a demandé si la dégradation de l’ambiance au sein du Conseil fédéral avait pesé dans son choix de s’en aller. Sans surprise, il a déclaré qu’il n’y avait «aucun lien» entre les deux.

Il a tout de même ajouté que la législature qui s’achève avait été «la pire depuis la Seconde Guerre mondiale. Les crises se sont succédé l’une après l’autre et cela a créé des tensions», a-t-il reconnu. «Mais maintenant l’ambiance est très bonne et positive», a-t-il tempéré aussitôt.

Lot de consolation

Interrogé sur le profil que devait avoir son successeur, l’homme a estimé que c'est «surtout une question de personnalité, pas de politique partisane». Il a relevé l’importance d’avoir une bonne connaissance de l’administration et des procédures, ainsi que de disposer d’un bon réseau.

N’en déplaise au profil idéal qu’il dresse là, les questions de politique partisane devraient être primordiales dans le choix de son successeur. Elles l’avaient été lors de son élection en 2015, perçue comme un lot de consolation pour les partis du centre, après le remplacement au Conseil fédéral d’Eveline Widmer-Schlumpf (PBD) par Guy Parmelin (UDC).

L’UDC veut le poste

Cela n’a pas traîné. A peine la démission du chancelier était-elle rendue publique que le chef du groupe UDC au parlement Thomas Aeschi revendiquait le poste pour son parti. Rappelant l’échec de la Broyarde Nathalie Goumaz, en 2007, le Zougois a souligné sur les réseaux sociaux que «jamais encore le plus grand parti de Suisse n’a occupé la fonction de chancelier fédéral».

A ses yeux, la gauche est déjà bien pourvue, avec le socialiste André Simonazzi comme vice-chancelier et porte-parole du Conseil fédéral. Ce dernier pourrait-il aussi briguer le poste? «Il est prématuré d’apporter une réponse», a-t-il indiqué en conférence de presse, où il était présent aux côtés de Walter Thurnherr.

Un jeu ouvert

A défaut d’obtenir un fauteuil au Conseil fédéral, les Verts pourraient-ils être titillés par le poste de chancelier? «C’est sûr que c’est un poste vraiment important. Ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle le 8e conseiller fédéral», reconnaît le conseiller national genevois Nicolas Walder.

«Mais il n’est pas question pour nous d’accepter ce poste comme lot de consolation», insiste le vice-président du parti. «Avec 13% des voix, nous avons droit à un siège au Conseil fédéral.» Les Vert’libéraux pourraient aussi revendiquer le poste. Avec un atout dans leur manche: l’autre vice-chancelier, Viktor Rossi, est encarté dans leur parti.

Même si elle sera beaucoup moins médiatisée que la course à la succession d’Alain Berset, celle de Walter Thurnherr promet d’être animée. Elle pourrait ajouter un peu de piment à la première et ouvrir le champ des possibles, notamment en lien avec les aspirations des Verts à intégrer le gouvernement.

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