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Point de vue de Patrick Vincent: "Osons appeler un chat un chat"

Le journaliste de l'ultra-droite américaine Steve Bannon a été accueilli à Zurich par les pontes de l'UDC. Professeur à l'Université de Neuchâtel, Patrick Vincent décrypte cette visite. Découvrez son point de vue: comme d’autres personnalités locales, nous l’invitons à s’exprimer régulièrement sur des sujets d’actualité.

08 mars 2018, 12:01
Steve Bannon, représentant de l'ultra-droite américaine, a été reçu en grandes pompes à Zurich.

Les analyses des résultats du vote No Billag ont préféré ignorer une évidence: ce fut une cinglante défaite pour la droite dure. Moins d’un tiers des votants se sont reconnus dans la vision cyniquement néolibérale et anti-Suisse imaginée par le parti du peuple. Désormais, ils n’ont plus qu’une corde à leur arc, l’immigration.

Une fois de plus, l’UDC sera tentée de battre campagne avec des messages haineux. Une fois de plus, l’immigré en sera leur bouc émissaire. Pourquoi changer une formule qui a fait ses preuves? Ne soyons pas dupes des plaisanteries bon enfant de leurs représentants au Conseil fédéral, ou encore des airs de Hausfrau de leur nouvelle vice-présidente. Leur idéologie, un savant mélange de nains de jardin et de néolibéralisme, de racisme et de rösti, n’a rien de normal. 

Aux frasques néofascistes d’un Freysinger ou encore au souverainisme schmittien d’un Köppel on peut désormais ajouter les délires millénaristes de Steve Bannon. Accueilli en visionnaire à Zurich par les pontes de l’UDC, ce dernier a eu la perspicacité de comparer Blocher au président des Etats-Unis, actuellement sous investigation pour soupçon de haute trahison.

Chantre du retour d’un nationalisme autoritaire, Bannon est l’étoile d’une extrême droite décomplexée. Trop tumultueux pour l’administration chaotique de Trump, désavoué par les Américains, il rêve de semer la zizanie en l’Europe. Son allure de prof tombé du lit aide elle aussi à normaliser des idées longtemps mises au ban de la société. Or parmi ses lectures de chevet on trouve Charles Maurras ou Julius Evola, plus portés sur les bottes de cuir et le pas de l’oie que sur les chemises ébouriffées du tribun.

Sans surprise, ce sont surtout ses attaques sur l’immigration qui ont suscité les applaudissements des 1500 spectateurs. Car, on le sait, la distinction entre ami et ennemi permet de substituer le plébiscite au suffrage, la dictature à la démocratie. Rappelons-nous du cauchemar imaginé par Orwell de la botte «piétinant un visage… éternellement», et osons appeler un chat un chat, partout et par tous les moyens.

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